Un véritable ballet, une valse à cent dix ans
Un véritable ballet, une valse à cent dix ans
Un roman dont le personnage principal est une magnifique robe noire. On passe du feel good,au polar voire aux témoignages historiques.L'écriture précise,les descriptions fouillées s'adaptent à l'actualité de la page.
Une lecture addictive qui vous fera passer un excellent moment,soyeux,doux,exceptionnel comme cette "petite robe noire"copiée mais jamais égalée!
Il y avait "Le chapeau de Mitterand" d’Antoine Laurain, il y a désormais "La robe" de Catherine Le Goff. J’ai reçu ce roman dans le cadre du cercle livresque de Lecteurs.com que je remercie chaleureusement, ainsi que la maison d’Editions Favre, pour cette lecture. Je ne connaissais pas l’auteure et n’avais rien lu de la teneur de l’ouvrage… la découverte fut belle.
Cet ouvrage aurait tout aussi bien pu s’appeler "La petite robe noire", si ce n’était déjà pris par un sublime parfum… car il s’agit bien d’une robe – noire – qui traverse la vie sur plus d’un siècle. Portée par de nombreuses femmes, toutes particulières, voire étonnantes pour certaines, elle offre à chacune un petit supplément d’âme, de confiance, de bonheur, de chance. J’ai beaucoup aimé ce roman qui tient à la fois du précis d’Histoire, du manuel de psychologie, du guide de voyage, du roman d’amourS et même de l’intrigue policière … il y a tout de même quelques meurtres et enquêtes.
"La robe" est un récit très riche et extrêmement fouillé. Ce fil rouge – ou plutôt noir – que constitue le vêtement permet à l’auteure de nous dresser le portrait de très beaux personnages, de revenir sur des événements historiques et politiques de grande envergure, de nous faire voyager. Elle nous parle avec beaucoup d’émotion de la déportation des populations juives lors de la seconde guerre mondiale, de la chute du mur de Berlin ou encore, plus près de nous, des attentats du 11 septembre. Tout est évoqué dans le moindre détail, observé, analysé. J’ai, de plus, particulièrement apprécié l’écriture qui évolue en fonction des années. De surannée, au début, en 1900, lorsque Jeanne travaille pour Madame Darmentière, cette pimbêche désagréable, première propriétaire de la robe, elle devient de plus en plus débridée au fil des années.
La construction est parfaitement maîtrisée qui mêle la chronologie et les retours en arrière. J’ai suivi avec facilité et grand plaisir la vie de cette magnifique tenue, ses transformations et ses péripéties. Elle est volée, perdue, retrouvée, achetée et elle continue sa vie raccourcie, raccommodée, accessoirisée. Elle se fait passeuse de microfilms, tenue de scène, objet de musée. Un véritable ballet, une valse à cent dix ans qui se termine presque là où elle avait commencé par une fin en apothéose.
Roman addictif, véritable page turner, je n’ai quitté "La Robe" de Monsieur qu’à la toute dernière page. Elle m’est allée comme un gant.
Catherine le Goff a construit ce roman sur une idée originale, suivre une robe durant un siècle et nous raconter la vie de toutes celles qui l’ont portée. De Paris à New York, en passant par l’Allemagne nazie, laissez-vous entrainer par son frou-frou.
Jeanne vit à la ferme et s'occupe de ses chèvres. En 1900 –elle a alors quatorze ans – sa vie va basculer une première fois. Son père décide de la confier à un couple de bourgeois en villégiature qui recherche une cuisinière et dont les papilles vont se régaler des plats de la jeune fermière. De retour à Paris, il ne faudra pas longtemps aux Darmentière pour réclamer la bougnate. Si le maître de maison est ravi de son choix, son épouse y voit une rivale et décide de s'en débarrasser. Elle met le feu à ses livres de cuisine et finira par avoir gain de cause. Mais à la veille de son départ, Jeanne s'introduit dans la chambre de sa patronne et lui vole une robe. Un butin qui la fascine et qui va la pousser, deux ans plus tard, à suivre des cours de couture. Aidée par son ancien patron qui ne l'a pas oubliée et qui est conscient de son talent, elle va ouvrir sa propre boutique. Mais l'euphorie sera de courte durée. Elle se marie avec un homme qui va s'avérer violent et alcoolique, lui fera un fils avant de partir pour le front. Il mourra à Verdun en 1916. Dès lors, Jeanne va s'investir totalement dans son travail, secondée par un fils qui ne va pas tarder à connaître tous les secrets du métier.
Catherine Le Goff va alors nous proposer une sorte de panorama du XXe siècle en suivant LA robe, personnage à part entière du roman. Elle aidera Paul, le fils de Jeanne, à se faire connaître dans le milieu de la mode. Quand il ne décide de s'en séparer, il choisit parmi ses clientes une chanteuse d'opéra, Ruth Bestein.
Durant la Seconde Guerre mondiale, la cantatrice juive va disparaître, laissant sa robe sur les épaules de sa fille Sarah, raflée elle aussi. Ce qui va lui permettre d'avoir la vie sauve, car au camp de concentration, on la charge de travaux de couture pour un haut dignitaire nazi. Son épouse finira par récupérer la robe.
Quelques années plus tard, alors que Berlin se déchire en deux, Gerta confiera la robe à sa nièce Jana, une actrice. Sans le savoir, cette dernière transporte dans la ceinture confectionnée pour l'occasion, les secrets que son mari, espion pour le compte des Américains, fait passer d'Est en Ouest. Lorsque l'on vient lui annoncer la disparition de son mari – et ses véritables activités – Jana parviendra à fuir et trouver refuge aux États-Unis avec sa fille, sous une fausse identité.
Commence alors la carrière américaine de la robe, qui va à nouveau changer plusieurs fois de propriétaire, recroiser la route de Paul et Sarah, et subir quelques outrages. Mais durant près d'un siècle son odyssée sera fascinante.
Entre roman historique et roman d'espionnage, entre roman de mœurs et thriller, cette histoire qui dévoile le destin de quelques femmes exceptionnelles, se lit comme une valse à mille temps, de celle qui met en valeur les robes et nous font lever les yeux sur celles qui les portent. On se laisse volontiers entrainer et griser par la plume allègre de Catherine Le Goff.
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