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Pendant presque quatre ans, de 1941 à 1945, 30 000 soldats africains-américains furent confinés à Fort Huachuca, seul « poste noir » du pays, situé à la frontière avec le Mexique, très loin de toute communauté blanche, de la capitale et des théâtres d'opération.
Dans ce désert fleuri, les fantassins de Huachuca durent accepter la discipline qu'une armée, convaincue de la supériorité raciale des Blancs, voulut leur imposer, et la sujétion que l'état-major s'efforçait de leur faire accepter. Méfiante à l'égard des soldats noirs tenus pour lâches et incapables depuis la Première Guerre mondiale, l'armée en craignait la mutinerie. En lisière du pays, elle organisa donc une ségrégation extrêmement stricte, et dure aux hommes. Mais le commandant du fort ne pouvait se permettre de voir le camp s'embraser. Le temps libre des soldats devait donc leur offrir des dérivatifs et des divertissements suffisamment puissants pour désamorcer en eux toute volonté de contestation. Une autre concession, beaucoup plus inattendue, fut faite : les soins médicaux évoluèrent en quelques semaines vers une médecine d'excellence racialement intégrée, expérience unique au sein de l'État fédéral.
Pauline Peretz nous raconte l'histoire de ce lieu oublié d'Arizona, situé à l'extrémité sud du pays, où se joua, pendant la Seconde Guerre mondiale, le rapport tortueux et honteux de l'Amérique à ses soldats noirs.
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