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À trente-cinq ans, Jodi McCarty a passé la moitié de sa vie en prison. Condamnée à perpétuité, elle vient d'obtenir sa liberté conditionnelle. Elle part retrouver sa famille dans les collines pourpres des Appalaches, où un bout de terrain l'attend. Elle espère enfin construire sa vie. Mais avant de se tourner vers l'avenir, Jodi doit faire un détour par le passé et tenir une promesse. En route vers le Sud, elle fait la rencontre de Miranda, une jeune mère désemparée qui fuit son mari. Mues par un coup de foudre électrique, les deux femmes décident de prendre ensemble un nouveau départ. Mais Jodi ne tarde pas à se heurter à un monde dans lequel les gens refusent d'oublier ou de changer.
2020, une sale année avec cette crise sanitaire mondiale. Après 2 mois ½ de confinement on nous rabâche qu’il faut faire vivre le commerce local, acheter des livres chez les libraires indépendantS. Sugar Run sera mon premier achat de livre en sortie du confinement sur les conseils du libraire Pages d’encre à Amiens. Après avoir discuté avec ce Monsieur, je m’en suis totalement remis à ce qu’il me proposait.
Je n’ai pas adhéré et je n’ai pas su lire ce livre. Le style d’écriture ne m’a pas plu et m’a paru trop confus. Bref j’ai abandonné.
« Peut-être, pensa Jodi, que la liberté, c'était comme plonger dans l'océan, ou remonter à la surface, plutôt. Elle avait entendu dire qu'on pouvait en mourir, de remonter trop vite. Quelque chose continuait votre sang. »
Dès les premières lignes, le récit s'inscrit dans la lignée du roman noir. Jodi est libérée de prison après 18 ans purgés pour meurtre, plus de la moitié de sa vie. Une vie à reconstruire sur les terres familiale, en Virginie-Occidentale, une promesse à tenir, une société à réintégrer.
Tout l'enjeu du roman est de savoir si, une fois passé le choc de la liberté, Jodi va pouvoir accéder à la résilience et construire la vie de paix et d'amour qu'elle appelle de ses voeux. Challenge d'autant plus difficile que les personnes qui l'entourent sont toutes comme elle border-line : Rickie, le frère de sa petite-amie décédée avant son incarcération, personnage troublé et troublant qu'elle entend « sauver », et Miranda, mère de famille en fuite, complètement paumée, impulsive et charmeuse, avec laquelle Jodi entame une relation amoureuse pas si simple. Tout peut basculer, on sent la tension derrière chaque décision de Jodi, on sent la violence sourde qui peut exploser à tout moment.
Si la construction aurait pu gagner en clarté, le talent de l'auteure est évident au fil de cette lecture. Elle impose un univers très sensible au genre du roman noir américain souvent enseveli sous une avalanche de testostérone. Là, au contraire, on a un vrai point de vue féminin, construit et intelligent, plongé dans une Amérique des marges parfaitement décrite. La société des Appalaches, rongée par la misère, les trafics de drogue et l'homophobie, en proie à l'avidité des compagnies de gaz de schiste, propose un cadre réaliste et dramatique très intéressant à la reconstruction possible de Jodi.
Les meilleurs moments de Sugar run se déploient lorsque l'auteure décrit ce monde qui va mal à travers les yeux de Jodi et son ressenti profond. J'ai senti chacune de ses gouttes de sueur, de ses espoirs, de ses effrois, chaque rayon de soleil que reçoit sa peau. L'écriture de Mesha Maren est d'une grande sensualité et offre au lecteur de superbes pages évoquant avec un lyrisme sobre et juste la nature à laquelle Jodi aspire. Certaines passages sont presque inattendus de tendresse, comme entendre des oiseaux chantés juste après une fusillade.
Un premier roman singulier et sensible comme je les aime.
J’ai respiré une bouffée d'oxygène dans les montagnes boisées de la Virginie occidentale.
A forte dose d'azote tout de même !
Jodi et Miranda sont Thelma et Louise du film de Ridley Scott, deux femmes en quête de liberté et de rédemption.
C’est une cavale au cœur des Appalaches, une course-poursuite contre le temps, l'absence et la mort, où la cabane d’Effie, la grand-mère de Jodi, est le dernier refuge.
J'ai particulièrement aimé le personnage d'Effie qui n'existe cependant que dans la mémoire de Jodi. Une présence constante et aimante grâce à des allers retours entre l’avant et l’après 2007, l’année de sortie de prison pour Jodi.
La beauté de ce roman se trouve aussi dans la description de la nature, l’observation des reliefs et les couleurs changeantes des paysages, à l’extrême attention portée aux premières communautés de ces montagnes :
« ces hommes au regard noir qui d’après les histoires d’Effie, allaient à la scierie en portant des rondins de chêne sur leur dos afin de fabriquer des lits pour leurs épouses, des hommes qui sauvaient les nouveau-nés en les plaçant dans les chauffe-plats des fourneaux lors de terribles tempêtes de neige, des hommes qui aimaient ces crêtes bosselées, ce sol calcaire et qui labouraient la nuit, cultivant leur terrain à la lumière d’une lampe frontale après une journée passée dans les mines de charbon ».
Une terre aujourd’hui meurtrie avec les forages de gaz de schiste creusée sans répit par des engins repus à la pâle lumière des stations-services.
Sugar run, est aussi une belle invitation à découvrir l'œuvre du poète anglais Alfred Tennyson que je me suis empressée de lire !
Un premier roman, dense et singulier, qui donne à voir un visage particulier de l’Amérique. Celui du sud des Etats Unis où la grande pauvreté et la désespérance sévissent, où les familles sont ruinées par l’alcool, la drogue, le jeu et les grands espaces convoités par la cupidité des hommes qui achètent les terres à bas prix pour exploiter le gaz de schiste.
Le personnage principal, Jodi McCarthy vient de voir sa peine de prison à perpétuité commuée en liberté conditionnelle. À 35 ans, elle a passé la moitié sa vie derrière les barreaux. À trop jouer avec la vie et au poker dans sa jeunesse, Jodi s’est brûlée les ailes. Et lorsqu’elle quitte l’univers carcéral, bien que personne ne l’attende, elle veut encore croire à l’amour, au bonheur.
Elle prend la route, avec ses incertitudes, et son road movie l’emmènera en Géorgie où elle a une promesse à tenir puis en Virginie où les terres de sa grand-mère, dans les montagnes des Appalaches, l’attendent, du moins le croit-elle. En chemin, elle rencontre Miranda, femme d’un chanteur de country, et ses trois enfants. Espérer, retrouver l’amour auprès de Miranda, pouvoir travailler sur ses terres, être libre, ne pas replonger, se racheter aux yeux de la société, voilà tout ce à quoi elle aspire. Mais bien sûr rien n’est jamais simple et mal entourée, mal conseillée, comment faire les bons choix ?
Deux grandes lignes narratives alternent dans le récit. L’une construit l’intrigue, entre sa sortie de prison en 2007 et ce qui va suivre, ses choix, ses doutes, ses difficultés. La seconde constituée de flash-back dans les années 80 déroule les événements troubles qui l’ont conduite en prison.
Le récit adopte le point de vue de Jodi, entrecoupé de celui de Miranda. D’une grande lenteur au départ, il trouve son rythme petit à petit. Autour de Jodi, dans cette Amérique en perdition, gravite toute une galerie de personnages complexes, certains peu reluisants, d’autres paumés, parfois aidant comme Farren, le vieil homme de la montagne.
« Sugar run » c’ est ainsi qu’on nomme un cycle de chance au poker. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la chance n’a pas souvent été du côté de Jodi. Dans cette quête de bonheur et de liberté, y aura-t-il pour elle une rédemption possible ?
Sugar run, c’est aussi une révélation, celle de la magnifique écriture de Mesha Maren. C’est un roman qui aborde de nombreuses thématiques : la difficulté de réinsertion sociale, l’homophobie, la misère, les addictions, la violence, la complexité des sentiments, des relations humaines … et qui montre à quel point il est parfois difficile de faire table rase du passé.
Mesha Maren signe un roman âpre et sombre sur fond de tragédie sociale. Un roman qui s’enracine dans les montagnes sauvages des Appalaches et donne voix à deux héroïnes que rien ni personne n’a épargnées mais bien décidées à vivre leur vie coûte que coûte.
Encore une belle découverte des éditions Gallmeister. Un très bon moment de lecture, je recommande ! Idée de playlist, la belle voix de Marianne Faithfull, une ballade comme dans Thelma et Louise !
Une histoire de promesses
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Sugar run nous parle de promesses: celles que nous nous faisons à nous-mêmes et celles que nous faisons aux autres. Lorsque Jodi McCarty est libérée de prison à 35 ans après avoir purgé une peine de 18 ans, elle décide de tenir une promesse faite près de deux décennies plus tôt à son amante aujourd'hui décédée.
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La narration alterne entre 2007, date à laquelle Jodi sort de prison et 1988, date à laquelle nous découvrons petit à petit les événements qui l'on conduite derrière les barreaux.
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2007: Jodi espère débuter une nouvelle vie sur les terres de sa grand-mère dans les Appalaches. Elle se dirige d'abord vers le sud de la Géorgie pour respecter un pacte implicite, conclu avant la prison. Elle doit sauver le frère de Paula, son ex-petite amie, d'un père violent.
Mais les âmes perdues attirent les âmes perdues, et avant que Jodi ne puisse localiser ce garçon maintenant adulte, Ricky, elle rencontre Miranda, l'épouse d'un chanteur de country, et ses trois enfants. Leur rencontre est immédiatement une histoire d'amour brûlante. Elle convainc Miranda de s'enfuir avec ses enfants et de la suivre dans les Appalaches...et c'est le début des mauvais choix.
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Un roman construit minutieusement et qui aurait pu n'être qu'un énième roman américain sur la rédemption si Mesha Maren n'avait pas choisit de mettre au centre de son histoire des femmes, des femmes homosexuelles au milieu des montagnes et au pays des Hillbillies.
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Si je ne me suis pas suffisamment attachée aux personnages pour que l'histoire me brise le coeur, j'ai adoré le soin apporté à l'étude psychologique des protagonistes et la complexité de chacun.
Au delà de Jodi, de Miranda et de Paula, il y a d'autres personnages remarquables comme Farren le vieil homme de la montagne, les frères de Jodi qui sont à des stéréotypes, malheureusement trop réels. Un casting parfait dans un décor d'Amérique en friche, parsemé de casino de bords de route, de mines abandonnées, de bordels de campagne où des gardes armés contrôlent à la fois les clients et les prostituées immigrées.
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Un roman sombre, traduit par Juliane Nivelt, et que j'ai eu le plaisir de découvrir grâce au #picaboriverbookclub
Loin des strass, des paillettes et des grandes villes américaines, l’auteure nous conte une histoire à la fois tragique et pourtant remplie d’espoirs. Le destin de ces oubliées de la société américaine est abordé sobrement, sans tomber dans le pathos. Elle leur donne la parole, en les faisant vivre sous sa plume. Pour un premier roman, Mesha Maren a finalement mis la barre très haute, par sa justesse des mots mais aussi par une écriture tendre et véridique.
Jodi sort de prison après avoir passé plus d’années à l’intérieur des murs qu’à l’extérieur. Reconnue coupable d’un meurtre, elle voit sa peine de réclusion à perpétuité finalement révisée. Comment reprendre sa vie en mains après n’avoir connu que les quatre murs d’une cellule durant tant de temps? Après sa rencontre avec Miranda, jeune mère aussi paumée qu’elle, leurs destins s’unissent pour prendre un nouveau départ. Mais les blessures d’hier ne sont pas facilement cicatrisables et l’idée d’une seconde chance n’est peut-être finalement qu’une chimère.
A des années lumières des grandes métropoles, on évolue sur des routes de campagne, où les kilomètres s’enchaînent. Mesha Maren met en avant des personnages principaux féminins, marquées par la vie, pour qui chaque jour est une épreuve et où l’avenir se limite au lendemain.
Livre atypique, mais dans le bon sens (comme le sont généralement ceux édités par la maison d’édition Gallmeister), c’est toute une atmosphère qui est transmise par les mots de l’auteure. Sorte de Thelma et Louise dans une version revisitée, les laissées pour compte de la riche société matérielle moderne ont voix au chapitre et Mesha Maren nous conte ici une histoire si tragique et pourtant si réelle.
Voilà encore un livre qui m’a énormément plu dans le cadre de la sélection « Roman » qui nous était proposé à mes copines jurées et à moi-même. Le choix n’en sera que plus cornélien au vu de la qualité des livres que nous avons reçus.
Lu dans la cadre du Grand Prix des Lectrices Elle 2020, sélection « Roman », soumis au jury du mois de mars.
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