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Qui mène ? Qui décide ? C'est la question politique de l'époque. Depuis des décennies que des guerres de prédation économique embrasent le Sud et corrompent les chefs d'État ; que des navires de complaisance y convoient des armes et nous reviennent avec le fruit du pillage ; que des mercenaires se trouvent mobilisés à l'instruction d'on ne sait qui ; que les trafics de stupéfiants entraînent en quelques générations des fortunes aussi grandes que des PIB nationaux ; que des milliards $ se dissipent annuellement dans un triangle des Bermudes de l'argent sale ; que les auteurs de tels placements se dressent ensuite sous la houlette cravatée d'« investisseurs » prétendant à la préhension de tout ; que les services publics des États du Nord sont amputés des sommes équivalentes aux bonis faramineux que s'octroient les chefs n d'empires ; que des escrocs de la finance vampirisent les économies de populations entières sans rencontrer quelque obstacle que ce soit. depuis tout ce temps, on conçoit que les institutions publiques ont perdu leur emprise sur la marche du monde. Que des acteurs puissants se profilent offshore, hors des frontières de la politique formelle et du droit. Le règne de cette « souveraineté offshore » implique que les principaux décideurs de la chose publique n'agissent plus dans la sphère du public. Ils se sont aménagés ces juridictions politiques sur mesure - les « paradis fiscaux » - qui leur permettent de peser de manière décisive sur le cours historique des choses sans devoir répondre de quelque principe démocratique que ce soit. Des subalternes se prêteront dans les États de droit au cirque des campagnes électorales et au théâtre des assemblées législatives, puis on emballera cela dans l'enveloppe de la « gouvernance » afin de satisfaire le peuple de ces ombres chinoises. Qu'il ne croie pas à ces mensonges importera peu puisqu'eux seuls seront tout ce à quoi il aura droit. L'État de droit que l'on conçoit d'ordinaire devient méconnaissable lorsque, résolument domestiqué, il compte seulement dans la main des acteurs financiers tel un atout supplémentaire que leur confère la souveraineté offshore quant aux affaires du monde ; le « crime » et l'« illégalité » sont des termes de peu de portée lorsque tout ce qu'ils recouvraient antérieurement se trouve aujourd'hui autorisé et même encouragé dans des juridictions offshore dont on reconnaît par ailleurs la pleine souveraineté, lorsque celles-ci ne partagent pas avec des États de droit reconnus leur siège dans les instances de la Banque mondiale ou ne sont pas dûment membres de l'Union européenne.
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