"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Comme tout artiste ayant adhéré à un mouvement, même brièvement, Noël Dolla est pour toujours associé à Supports/Surfaces. C'est début 1971 qu'il rejoint explicitement le groupe constitué quelques mois plus tôt, en septembre 1970 ; c'est dès juin qu'il est l'un des signataires du « tract blanc », lettre de scission rédigée, à Nice, avec Claude Viallat, Toni Grand, Patrick Saytour et André Valensi. Quelques mois tout au plus de participation active, quelques années de compagnonnage, au sein d'une carrière qui dure depuis plus de cinquante ans, mais je ne crois pas avoir jamais lu aucun article ni ouvrage qui cite son nom sans le rattacher aussitôt à Supports/Surfaces (et celui-ci commence d'évidence très mal, de ce point de vue). Cette association conduit inéluctablement à interpréter l'oeuvre de Dolla, sans d'ailleurs généralement se limiter aux débuts de celui-ci, au prisme des déclarations collectives du tournant des années 1960-1970 : ses semis de points sur diverses surfaces, ses étendoirs où sont suspendus des tissus tels quels ou en partie peints ou teints, ses tarlatanes iridescentes enroulées ou pendant au mur apparaissent alors comme des incarnations d'une entreprise systématique de déconstruction des composants matériels du tableau, la réponse à « une théorie matérialiste et dialectique [qui] demande de déconstruire et d'analyser dans l'objet toute l'idéologie du système politique et économique en vigueur », pour reprendre les termes utilisés par Daniel Dezeuze et Louis Cane dans l'article « Pour un programme théorique pictural », conçu en mai 1970 pour exprimer le point de vue de l'ensemble du groupe1. Et cela d'autant plus que Dolla fut enrôlé jusque pendant la seconde moitié des années 1970 dans la tendance européenne de la « peinture au degré zéro » ou « peinture analytique », par des critiques comme Giorgio Cortenova, Klaus Honnef, Catherine Millet ou Bernard Lamarche-Vadel, qui parla à son propos de « réduction phénoménologique de l'acte peint2 ». [...] Éric de Chassey.
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