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1972, Belfast, quartier catholique. Par une sombre nuit de décembre, une mère de famille est enlevée sous les yeux de ses dix enfants. Ils ne la reverront jamais...
Pourquoi une femme apparemment sans histoires s'est-elle retrouvée la cible de l'IRA ? Était-elle réellement une moucharde ? Et pourquoi, alors que tout le monde connaissait l'identité des agresseurs, personne n'a rien dit ?
En s'intéressant à l'« affaire Jean McConville », Patrick Radden Keefe, journaliste au New Yorker, revisite toute l'histoire du conflit nord-irlandais. Des manifestations du début des années 1960 jusqu'à la vague d'attentats qui a terrorisé tout le Royaume-Uni, en passant par les grèves de la faim de Bobby Sands et des Blanket men, il en révèle les derniers secrets, les zones d'ombre et, surtout, le prix à payer pour les individus.
1972 à Belfast, Jean McConville veuve et mère de dix enfants est enlevée chez elle et disparaît. Ses enfants n’auront plus jamais de nouvelles d’elle. La fratrie finira éclatée, placée dans des orphelinats dont certains ne sortiront pas indemnes. Pourquoi Jean a-t-elle été enlevée et par qui ? Qui avait intérêt à faire disparaître cette femme apparemment sans histoire ? En suivant ce fil rouge Patrick Radden Keefe retrace l’histoire de l’Irlande des années 70 à aujourd’hui à travers une enquête journalistique particulièrement riche et documentée. C’est ainsi tout le conflit Nord-irlandais que le journaliste explore, entrant dans le fonctionnement de l’IRA, revenant sur les grands épisodes marquants de cette époque comme par exemple les attentats au Royaume-Uni ou les grèves de la faim des Blanket Men. Et jusqu’à l’élection en tant que député de Gerry Adams et les scissions qui apparaissent au fil du temps entre les différents protagonistes dont les vues finiront par diverger.
Je l’ai dit, c’est extrêmement bien documenté et le récit met à jour une bonne part de zones d’ombre de cette page d’histoire. Patrick Radden Keefe a pris le parti de réellement donner vie aux témoins de l’époque en suivant particulièrement certains d’entre eux comme Dolours Price ou Brendan Hugues. Ce sont ainsi tous ces portraits et points de vue croisés qui donnent toute sa force au récit et qui nous immerge dans les heures difficiles de l’Irlande. Le livre est aussi très intéressant par l’analyse qu’il fait des séquelles psychologiques qui restent même après avoir quitté une lutte qui s’est menée armée. Car poser des bombes, tuer des personnes (parfois même des compagnons d’arme considérés comme des mouchards), mener des grèves de la faim, ne sont pas anodins. Tout comme voir celui qui fut un meneur, Gerry Adams, pour ainsi dire rentrer dans le rang en accédant aux plus hautes fonctions politiques. Beaucoup se sont sentis trahis, abandonnés avec leur conscience et leur passé.
Et que devient Jean dans tout cela ? Le travail d’enquête permettra de donner une piste et une hypothèse très crédible en ce qui concerne sa disparition.
C’est extrêmement érudit mais toujours accessible même si on n’est pas familier de cette période des Troubles qui ont secoué l’Irlande et l’Angleterre. Il n’est pas surprenant que ce livre ait été largement remarqué (Prix Orwell du livre politique 2019 ; National Book Critics Circle Award pour la Non fiction 2019…). Une enquête journalistique très précise qui donne un bel éclairage sur cette période complexe aux nombreuses répercussions.
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