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Loin du Brésil ; entretiens avec Véronique Mortaigne

Couverture du livre « Loin du Brésil ; entretiens avec Véronique Mortaigne » de Claude Levi-Strauss et Veronique Mortaigne aux éditions Editions Chandeigne&lima
Résumé:

« Ce São Paulo, que j'avais connu à une époque où il atteignait tout juste un million d'habitants, en comptait déjà plus de 15 million. Les traces et les vestiges de l'époque coloniale avaient presque entièrement disparu. São Paulo était devenue une cité effrayante, hérissée de kilomètres de... Voir plus

« Ce São Paulo, que j'avais connu à une époque où il atteignait tout juste un million d'habitants, en comptait déjà plus de 15 million. Les traces et les vestiges de l'époque coloniale avaient presque entièrement disparu. São Paulo était devenue une cité effrayante, hérissée de kilomètres de tours, à tel point que, désireux de revoir non pas la maison où j'avais habité - elle n'existait sans doute plus -, mais la rue où j'avais vécu pendant quelques années, j'ai passé la matinée bloqué dans les embouteillages sans pouvoir y arriver. » Claude Lévi-Strauss ne souhaitait pas donner un grand entretien qui résumât sa carrière et sa pensée, mais il voulait, à l'occasion de l'Année du Brésil en France, commencée en mars 2005, revenir sur sa relation au « pays du bois de braise ». En 1935, jeune professeur de 27 ans, il arrive à São Paulo, puis s'enfonce dans le Mato Grosso sur les terres indiennes, inaugurant sa carrière d'américaniste. Cette période d'étude de terrain, qu'il poursuivra jusqu'en 1939, servira de base à la construction théorique de son anthropologie structurale.
Après un long séjour aux États-Unis, où il fuit les persécutions antijuives, il publie en 1955 Tristes Tropiques, qui commence par une phrase devenue célèbre : « Je hais les voyages et les explorateurs ». Livre d'ethnologie à la poésie lumineuse, ce volume s'inscrit dans la lignée des récits de voyages des ethnologues Michel Leiris ou Alfred Métraux, attachés au Musée de l'Homme comme l'a été Claude Lévi-Strauss. Mais ce récit très littéraire, intime, qui raconte la genèse d'une démarche scientifique, remonte aux sources de la découverte de ces Brésils de l'intérieur, indigènes et urbains.
Claude Lévi-Strauss, dans l'histoire des relations, très anciennes, entre la France et le Brésil, prend ainsi sa place, entre Jean de Léry et Mário de Andrade, son ami ethnologue, ethnomusicologue et, comme lui, fou de musique, qui publie en 1927, sous le titre de L'apprenti touriste, le compte rendu de son premier voyage ethnographique à travers l'Amazonie sauvage.
Claude Lévi-Strauss, âgé de 96 ans, habite sur la rive droite de Paris. D'une extrême courtoisie, il nous reçoit dans sa bibliothèque, portant costume et cravate à noeud métallique orné de motifs indigènes - « un banal artisanat », dit-il. Au milieu des volumes reliés, un mât sculpté indien du Canada, beaucoup d'objets asiatiques, un objet rituel tibétain. Peu de ce Brésil, un continent en soi, qui a marqué à jamais le dernier des grands intellectuels français né au début du XXe siècle.
À la veille des célébrations du « pays du bois de braise » en France, l'auteur de Tristes Tropiques revient sur sa relation essentielle à ce pays, où il a fait ses premiers pas d'ethnologue. Aujourd'hui, souligne-t-il, la civilisation à l'échelle mondiale a mis fin à ce type de découverte.

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