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Au soir du 1er décembre 1934 - jour de l'assassinat du chef du Parti de Leningrad, Sergueï Kirov -, Staline ordonne d'élargir et d'accélérer la répression de tous les suspects de la « préparation d'actes terroristes ». Le signal de la plus gigantesque répression policière du xxe siècle est donné. Pendant quatre ans, des milliers de responsables du régime soviétique vont être arrêtés, emprisonnés et souvent exécutés. La liquidation de tous les anciens opposants à Staline va s'étendre, par cercles concentriques, à la majeure partie des cadres dirigeants. Les accusés, soumis à des procès publics, avoueront unanimement les crimes les plus abominables et les plus invraisemblables. Une fraction notable de l'opinion internationale quant à elle se cantonnera dans une expectative prudente, voire s'aveuglera sur ces mascarades judiciaires. Nicolas Werth retrace ici, parallèlement au récit mouvementé des « grands procès », la genèse et la dynamique de ce moment paroxystique de la logique totalitaire. Il le fait en tenant compte des données nouvelles et des discussions historiques récentes. Au-delà des banalités sur le culte de Staline ou des généralités sur le totalitarisme, l'auteur apporte des clefs d'interprétation qui permettent de mieux cerner cette période tragique.
Un des symboles des dérives du régime communiste est sans conteste ces procès spectacles où les accusés se succèdent, avouant avec moult détails leur culpabilité, d’une docilité et d’une complaisance exemplaire.
Parmi les plus symptomatiques, on retrouve ceux des terribles années 1936 à 1938, période de la terreur stalinienne.
Pendant cette période, trois grands procès ont eu lieu à Moscou. Ce sont eux qui font l’objet de ce livre de Nicolas Werth, directeur de recherche CNRS, président de la branche française de l’ONG Mémorial.
J’avais déjà eu l’occasion de lire, et d’apprécier, son récit traitant de son séjour sur les traces de la Kolyma aussi me suis plongée rapidement dans ce livre.
L’auteur nous raconte brièvement chacun des trois procès, le nom des accusés et leurs métiers, les faits reprochés et enfin les peines prononcées.
Il se concentre ensuite sur les réactions dans la presse internationale et les tentatives menées par l’opposition russe en exil pour démontrer la fausseté des accusations portées.
Enfin, Nicolas Werth analyse la portée de ces trois procès par rapport à la grande terreur mentionnée précédemment : leur articulation, la façon dont ils ont été perçus, le rôle joué par Staline dans leur organisation et le sens à leur apporter.
Sans m’étendre davantage sur les détails, je vous laisserai vous plonger dans le livre, je trouve que la force du propos de Werth est sa grande clarté. Le texte est accessible, même aux gens novices en histoire russe.
Les concepts sont expliqués clairement et le tout est vivant et rythmé. Il est frappant de voir comment ces procès et les complots démasqués servaient de prétexte pour expliquer tous les échecs du stalinisme et comment ceci était approuvé par les russes de façon générale, qui voyaient en Staline, le petit père des peuples.
Cet ouvrage permet un approfondissement bienvenu sur les mécanismes à l’œuvre, lorsque la dictature, le totalitarisme se parent des atours de la démocratie, pour mieux la bafouer.
Un ouvrage très intéressant que je recommande.
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