"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Ce livre n'est pas une biographie supplémentaire d'Henri IV, promu au à la fin du XXe siècle idole monarchique des Français. Tentant de résoudre la plus extraordinaire énigme criminelle du temps des guerres de Religion, l'empoisonnement du prince de Condé à Saint-Jean d'Angély en 1588, Robert Muchembled a vu une piste initiale banale (cherchez la femme) bifurquer vers la responsabilité assurée d'un commanditaire dissimulé, père naturel, qui plus est, du fils posthume du prince assassiné : Henri de Navarre, futur roi de France.
C'est donc une histoire (incomplète) de la personnalité secrète du Béarnais qui est ici proposée. Si elle diffère de la mythologie traditionnelle appliquée à son souvenir, elle lui rend toute son humanité : ses qualités et ses succès vont de pair avec des traits moins glorieux, indispensables, probablement, pour survivre et triompher durant l'une des périodes les plus tragiques du passé français : dénué de scrupules moraux ou religieux, confiant (superstitieusement) en son étoile, il élimine sans pitié ceux ou celles qui le gênent ; maître de la désinformation, grand producteur de fausses nouvelles, il forge lui-même sa propre légende, dispose de l'un des plus efficaces services secrets du temps, cumule les maîtresses comme un Sultan oriental et traite durement son fils secret (héritier au trône intermittent, puis rival de Louis XIII après le régicide).
Bien qu'il véhicule des images fortes, d'ambitions effrénées, de sang, de poison, de violence, de désirs charnels, dignes de romans historiques ou policiers, le récit, chronologique, appuyé sur les documents d'époque (parfois inconnus, ou souvent mal mis en perspective) présente des faits réels et des personnages qui n'ont rien de fictif. Il invite à découvrir un exercice du pouvoir suprême plus chaotique, baroque et dramatique que celui évoqué par les manuels scolaires : en suivant les acteurs dans les coulisses, où ils ôtent un masque hiératique pour vivre pleinement leurs passions, apparaissent de nombreux mystères ; leur résolution colore de suspense la narration et rappelle que la grande Histoire (la geste des souverains et des dominants) aurait pu être profondément différente de celle qui s'est imposée.
En parfaite harmonie avec sa caste, la grande aristocratie guerrière prédatrice, le Vert-Galant impose aux filles et aux femmes nobles (aux autres aussi) une domination masculine absolue, renforcée par la croyance au pouvoir fécondant exceptionnel du « super mâle » royal (qu'il a vaillamment démontré). Bousculés depuis un demi-siècle par d'irrésistibles mutations sociales et culturelles, les nostalgiques de la grandeur nationale perdue qui encensent sa figure tutélaire ne tentent-ils pas, subrepticement, de moderniser le mythe du monopole viril du pouvoir (en particulier au sommet de l'État), inconsciemment mais puissamment relié à l'ancienne monarchie française salique et sacrée ?
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