Le palmarès de la rentrée littéraire 2018
Chronique à la fois très personnelle et très juste. Cela ferait un bel article dans une revue consacrée à la rentrée littéraire.
Une femme, écrivain, face aux assauts de la vieillesse. Chaque jour qui passe la rapproche de l’ombre, et elle constate, avec calme et lucidité, la déliquescence de ses facultés mentales. Autour d’elle se pressent les enfants, qui s’inquiètent pour elle, l’admonestent de quitter l’Australie pour les rejoindre. Elle s’y refuse pourtant, préférant affronter l'inéluctable dans la liberté et l'indépendance de la solitude, s'interrogeant jusqu'au bout, sans relâche, sur le sens de sa propre existence et sur la nature profonde de notre humanité.
En sept tableaux romanesques, J. M. Coetzee nous offre un somptueux portrait de femme et une leçon de littérature, aussi dense que brève. Dans une langue d’une épure admirable, il touche au cœur de nos interrogations les plus complexes et universelles (que restera-t-il de nous lorsque nous serons partis ? que transmet-on à ceux qui restent ?) et les affronte sans jamais se départir de sa suprême élégance, de sa dignité et de son humilité.
traduit de l'anglais par Georges Lory
Le palmarès de la rentrée littéraire 2018
La sixième édition des explorateurs de la rentrée ? Du neuf, toujours du neuf, l’enthousiasme est intact !
Quand 50 Explorateurs partent à la découverte des romans de cet automne...
C est un sujet très dure et je pense que le livre doit dur dur a lire l inceste est un sujet cruelle mais qui fait réfléchir un tres bon livre a decouvrir mais il doit etre très sang a lire je pense
Sept textes composent ce livre, sept textes indépendants des uns des autres, comme des pièces d'un puzzle qui une fois assemblées dresse le portrait d'Élisabeth Costello une écrivaine Australienne à l'aube de sa vie, « Je suis celle qui aimait rire et ne rit plus. Je suis celle qui pleure ».
Une femme têtue voir un peu déjantée qui se refuse d'abandonner sa maison de Castille malgré la pression de ses enfants John et Helen qui s'inquiètent de son isolement alors que sa santé décline, « La vérité vraie c'est que tu es en train de mourir, tu ne peux pas dire non au tic-tac de la pendule »
Des références littéraires ou philosophiques sont mises en référence de chaque nouvelle. La fin de vie est donc un des thèmes principaux de ce livre, « Tout comme le printemps est la saison qui regarde l'avenir, l'automne est la saison qui regarde vers l'arrière. Les désirs conçus par un cerveau automnal sont des désirs d'automne, nostalgiques, entassés dans la mémoire. Ils n'ont plus la chaleur de l'été. »
Mais l'auteur aborde aussi l'adultère et la notion de culpabilité, la beauté. Mais le plus déroutant sans doute est « L'abattoir de verre » qui donne son titre au livre. L'auteur s'interroge sur la place des animaux dans notre société et sur la souffrance animale, un parallèle audacieux avec le sort réservé à nos anciens.
Des sept textes, celui qui m'a le plus intéressé s'intitule sobrement « Histoire », une femme heureuse en ménage prend un amant pour le plaisir d'être désirée, admirée.
Si l'écriture douce amère est agréable à lire, je ne suis pas du tout entré dans l'univers de Coetzee.
Je ne suis pas très friand des recueils de nouvelles, c'est un exercice difficile, bien souvent la qualité est inégale.
Le prix Nobel Sud Africain de littérature est atypique. C’est sans doute ce qui lui a valu les honneurs très mérités de l’Académie de Stockholm. Son œuvre est parsemée d’exercices littéraires. Romans, Nouvelles, Fictions faussement documentaires, rapports épistolaires, l’ensemble toujours à la frontière du discours philosophique.
Une nouvelle fois avec « L’Abattoir de Verre », J.M.Coetzee s’adonne à un exercice de style, consistant ici à donner une unité à sept textes écrits au cours des dix dernières années.
Le personnage principal de chacun est une femme, différente tout en étant la même. On découvre même au fil de l’eau qu’il s’agit du personnage de romancière croisée en 2006, Elizabeth Costello. A mi-parcours débute alors la confrontation d’une mère vieillissante avec ses deux enfants qui aborde avec grande délicatesse une réflexion sur le temps et la vieillesse. Ces dialogues Mère-fille puis Mère-fils qui pourraient être assimilés à des bavardages s’ils n’étaient pas aussi magnifiquement structurés et rythmés par l’intelligence, nous amènent très tranquillement vers un discours testamentaire. Pas de doute, Elizabeth Costello est bien le medium de l’auteur par lequel il distille jusqu’à une émouvante fin un traité sur le vivant, le non-vivant et l’indicible. . Autant dire que la légèreté n’est pas au rendez-vous. Sommes-nous des passeurs potentiels ou tout simplement de futures cendres ? Peut-on refuser d’être assisté et terminer une vie par des choix non conventionnels ?
Le style, habituel chez Coetzee est concis, épuré au service d’un vocabulaire savant, dont résulte l’inimitable clarté du propos. On pourrait-être parfois chez Kundera. Mais avec un atterrissage peu romanesque sur la condition animale qui va éclairer le titre du roman, cet opus n’en est pas moins passionnant et vient rejoindre une famille qui se renforce depuis quelques années, dans laquelle il retrouve Jonathan Safran Foer, Vincent Message et Jean Baptiste Del Amo notamment.
J’ai aimé ce que j’ai lu. Pas seulement parce que j’ai adhéré, mais aussi du fait qu’à l’heure où de grandes Bibliothèques Municipales organisent des hommages à de laborieux romanciers de gare, je me suis senti privilégié, grandi, vivant.
Chronique des 100 pages (80)
« L’Abattoir de Verre »
J.M.COETZEE
Exercice de style du prix Nobel de littérature Sud Africain qui essaie visiblement ici de donner une unité à une série de textes écrits au cours des dix dernières années.
Le personnage principal de chacun est féminin, différent tout en étant le même. Le style, habituel chez Coetzee est concis, épuré au service d’un vocabulaire savant, dont résulte l’inimitable clarté du propos. Philosophie oblige.
A ce stade de l’exercice nous savons d’ores et déjà que la légèreté sera rarement au rendez-vous et que les réflexions sur le temps, la vieillesse, le vivant et le non-vivant seront abordées et affrontées. Heureux d’avoir à observer le Maître poursuivre son travail jusqu’à la septième et ultime étape.
Qui est vraiment Elizabeth Costello et quelle est sa part d’ombre et sa part de lumière ? En sept tableaux, et le mot ici prend tout son sens car il s’agit bien de composer l’image d’une femme, JM Coetzee nous permet d’approcher au plus près de l’intimité d’une femme âgée.
Alors, les nouvelles se succèdent, et comme un prisme, le focus se décale selon les âges et périodes de la vie d’Elizabeth pour éclairer différentes facettes de sa personnalité. Comme un puzzle il faut assembler le tout pour essayer d’entrapercevoir un début d’image.
Que ce soit sa relation avec ses enfants, son travail d’écrivain, son approche de la vie, de la peur, de l’adultère, de la rédemption. Chaque nouvelle fait résonnance avec les autres. Et ce n’est qu’à la fin que l’on réalise le tour de force de l’auteur. D’abord car ces nouvelles ont été écrites à des périodes différentes (chaque nouvelle est datée) et ensuite car il y a le talent incroyable de l’auteur pour arriver à créer cette unité. Avec un style juste, précis, dépouillé du superflu, JM Coetzee taille ses textes comme des diamants. Il y a là le génie littéraire qui souffle sur ces sept textes et par ce souffle, cette grâce de l’écriture, par l’exigence du trait, épure chaque ligne.
Il y a également la profondeur du propos et des échanges entre Elizabeth et ses enfants. On passe de la fascination à l’angoisse face à ces trois individus, campés dans leurs certitudes. Elizabeth se refuse à céder à ses enfants, ne veut pas être à leur charge et leur réclame au moins une vérité qu’ils ne peuvent lui livrer. Les enfants, inquiets de la santé de leur mère, la poussent à vivre avec eux. Les passages sur cette angoisse parent-enfant sont d’une beauté absolue. JM Coetzee dissèque dans ces échanges tout ce qui fait la relation familiale et avec une économie de mots et de détails qui rend encore plus forte la lecture.
Un autre point fort de ce texte est de livrer les sentiments de chacun, de permettre à la mère de s’exprimer librement et aux enfants de comprendre. C’est bien ce qui fait la force d’Elizabeth, cette soif absolue de vérité, de justice et d’équité (tant au niveau de sa propre famille, que pour «l’idiot » du village, ou les chats errants etc). En contrepoint, il y l’extraordinaire écoute et la bienveillance des deux enfants, qui jamais ne vont contredire leur mère ou se confronter à elle. Mais cette bienveillance n’est au final que le corollaire de l’amour qu’elle leur porte, cet amour maternel, ce respect de la vie qu’elle a engendrée.
J’ai été tout simplement absorbé par ma lecture : exigeant de son lecteur une attention absolue, l’auteur nous enferme dans la vie d’Elizabeth, nous cloisonne dans les chapitres de son existence et nous place à ses côtés en spectateur fasciné par son caractère. A dessiner le portrait d’une femme exceptionnelle, il fallait bien un style, cette épure qui justement nous dépouille de nos a priori et ne laisse que l’instant de grâce de la lecture.
Explorateur de la rentrée littéraire 2018 – Mon avis de la page 100
Le livre s’ouvre sur une courte nouvelle, sur l ‘histoire d’une femme qui n’arrive pas à cacher sa peur d’un chien. Mais s’agit-il bien ce cette peur là ? N’y a t-il pas quelque sentiment plus obscur ou symbolique dans son comportement.
Puis, on passe sur une autre nouvelle, dans laquelle une femme adultère envisage tous les tenants et aboutissants de son aventure extra-conjugale.
Composé donc de très courts textes, qui progressivement font corps, je reste, sur ce début du livre, subjugué par le style, précis et implacable.
Une découverte véritable, et brillante. Un plaisir de lecture rare et précieux.
Chronique à la fois très personnelle et très juste. Cela ferait un bel article dans une revue consacrée à la rentrée littéraire.
Avis à la page 100 - Explorateurs de la rentrée littéraire
Voila un livre court,beau, surprenant par son style vif, dépouillé, profond. A la page 100, on a lu quatre nouvelles sur les sept, toutes avec un personnage de femme dont on ne sait pas encore très bien s'il s'agit de la même présentée sous des angles différents. On comprend seulement à la quatrième nouvelle qu'il y a bien, vu leurs noms, des personnages récurrents qui l'entourent, mais dans des lieux ou des situations diverses. Le livre me laisse pour l'instant une impression étrange. Je ne sais pas exactement où l'auteur veut en venir, dans la mesure où les nouvelle sont toutes datées et ont été écrites en l'espace de plus de dix ans. Est-ce une reconstruction a posteriori et quel en est le sens ? Que veut nous dire l'auteur en nous présentant cette femme dans ses questionnements existentiels ? La première nouvelle est très forte, simple, très courte (Le chien). Les autres sont plus introspectives. A suivre...
Avis final :
J’ai été particulièrement touchée par ce livre. D’abord intriguée par sa forme, j’ai été au final séduite par sa cohérence, sa simplicité, son intelligence et son style.
Il commence par une courte nouvelle, « Le chien », qui fait entrer dans l’ambiance du livre. A partir d’une histoire toute simple - une jeune femme, confrontée à un chien aboyant de façon agressive à chacun de ses passages, pense que cet animal la déteste - c’est un questionnement fondamental sur notre place dans le monde et notre rapport aux animaux, mais aussi sur le niveau de conscience des êtres vivants, leur différence ou leur similitude, leur relations les uns avec les autres. On comprendra à la fin du livre, avec les deux dernières nouvelles, la logique et le sens de cette première histoire.
Le livre se poursuit avec six nouvelles qui sont comme des variations sur un thème. On saisit assez vite qu’une certaine Elisabeth Costello, femme écrivaine vieillissante, en est le personnage central.
Les nouvelles - chacune est datée - ont été écrites à des périodes différentes sur une période d’une dizaine d’années. Elles sont courtes mais denses. Parfois sous la forme d’un monologue, ou la plupart du temps d’une discussion entre la femme et ses deux enfants adultes, elles présentent une progression dans des questionnements existentiels. Avec une économie de moyens, un style simple et épuré, ce regroupement de nouvelles prend un sens que l’auteur, sans aucun doute, a voulu construire a posteriori. Et il y réussit magnifiquement, car on vibre à chaque page tant les dialogues (presque toujours des questions /réponses entre la femme et son fils) renvoient à notre propre vie.
On est pris d’abord par ce que la femme évoque de son histoire et qui résonnent de façon forte et juste : une « histoire » donne son titre à une nouvelle, et à travers elle s’interroge sur l’indépendance, la liberté, la fidélité, le mariage, l’amour. La morale au sens « bourgeois » n’y a pas sa place. Au-delà, c’est le désir et la beauté qui sont questionnées, avec des références littéraires - discrètes mais pertinentes - qui mettent la barre très haut en élevant le débat sans jamais le rendre inintelligible, intellectuel ou abscons. On est toujours sur le vécu et le sens qu’on donne à sa vie. C’est le tour de force et la grande qualité de l’écriture de Coetzee. Il sait nous parler de nous en faisant parler les autres, avec un style vif construit sur des dialogues et des questions (il y a beaucoup de points d’interrogation dans ce livre…)
Dans les tableaux suivants, on avance sur des sujets qui approfondissent les premiers. La femme vieillit mais ne veut pas se trouver dépendante de ses enfants, qui pourtant lui suggèrent de déménager près de chez eux. Ses arguments ne sont pas ceux d’une femme butée. Non, ce sont ceux d’une femme consciente de sa finitude et de la vanité de toute chose, et qui souhaite avant tout qu’on la laisse tranquille. Un besoin de « tranquillité » au sens fort, philosophique.
Les deux dernières nouvelles m’ont beaucoup intéressée car elles bouclent le cycle en affrontant la question de la fin, de la mort, avec simplicité et hauteur.
L’avant-dernière nouvelle intitulée « Mensonges » fait parler le fils dans une lettre à sa femme. Il y évoque le sujet de la fin de vie avec la lucidité d’un homme partagé entre la sollicitude qu’on doit à une mère et la nécessité de lui dire choses en face. La simplicité de l’écriture de Coetzee donne à ce monologue une humanité dépourvue d’affect et pourtant particulièrement émouvante.
La dernière nouvelle qui donne son titre au livre, « L’abattoir de verre », est plus complexe, avec beaucoup de références aux philosophes du XXe siècle. Elle m’a particulièrement intriguée et interpellée. Je l’ai lue deux fois… Elle aborde la question de la transmission. A travers notre lien à l’animal, il questionne notre « humanité » et ce qui restera de nous quand nous aurons disparu. Et toujours avec cette simplicité d’écriture qui m’a touchée car elle est sans barrières.
Le portrait de cette femme, avec sa conscience d’elle-même, est sans concession, tantôt agaçant (ses enfants ont peu de prise sur ses décisions, sur sa vie, et ne savent pas comment s’y prendre), tantôt émouvant. Mais il est aussi cruel. Cette femme vieillit et se rend compte des limites, physiques et intellectuelles, qui l’atteignent. Elle refuse pourtant de considérer qu’elles sont des limites à sa liberté, même si la solitude en est le prix à payer.
J’ai trouvé ce livre à la fois dérangeant et émouvant. Il me laisse une impression forte car à travers des histoires simples, sans fioritures, il touche à l’essentiel.
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