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Châtiment

Couverture du livre « Châtiment » de Percival Everett aux éditions Actes Sud
  • Date de parution :
  • Editeur : Actes Sud
  • EAN : 9782330186166
  • Série : (-)
  • Support : Papier
Résumé:

Dans ce livre audacieux, provocateur, Everett a le racisme et les violences policières dans le collimateur et déploie son intrigue à un rythme effréné, ne laissant aucune chance au lecteur de détourner le regard. Il écrit une suite possible, 63 ans après les faits, au lynchage d'Emmett Till, 14... Voir plus

Dans ce livre audacieux, provocateur, Everett a le racisme et les violences policières dans le collimateur et déploie son intrigue à un rythme effréné, ne laissant aucune chance au lecteur de détourner le regard. Il écrit une suite possible, 63 ans après les faits, au lynchage d'Emmett Till, 14 ans, accusé d'avoir sifflé et pris par la taille une jeune femme blanche, Carolyn Bryant. Dans cette comédie noire sur le fil du rasoir, Everett met en scène une série de meurtres violents visant certains des membres de la famille Bryant et fait vivre avec brio cette communauté blanche où subsiste le KKK. Le duo d'enquêteurs noirs dépêché sur les lieux pour prêter main-forte au shérif local est désopilant à souhait et promet des pages inoubliables dans la confrontation avec les rednecks du cru.

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Avis (2)

  • Lorsqu'on fait la connaissance de la famille Bryant-Milam, on rit gras et bruyant devant ces rednecks unidimensionnellement crétins et ridicules, à la limite de l'analphabétisme, menés par une matriarche grincheuse et une mégère surnommée Hot Mama Yeller ( « maman chaudasse et braillarde »...
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    Lorsqu'on fait la connaissance de la famille Bryant-Milam, on rit gras et bruyant devant ces rednecks unidimensionnellement crétins et ridicules, à la limite de l'analphabétisme, menés par une matriarche grincheuse et une mégère surnommée Hot Mama Yeller ( « maman chaudasse et braillarde » ).

    En quelques pages, on passe de la parodie de romans sudistes au polar lorsqu'un des membres de cette famille est retrouvé étranglé au fil barbelé, en compagnie du cadavre d'un jeune noir non identifié qui tient dans sa paume les testicules du premier. L'enquête est lancée …mais voilà que le corps du noir stocké à la morgue se volatilise …pour réapparaître sur une deuxième scène de crime avec les testicules d'un autre blanc dans les mains. Bienvenue à Money, petite ville rurale du Mississippi.

    Des bouquins dénonçant le racisme systémique aux Etats-Unis, y en a pleins, des chefs d'oeuvre mais aussi des lourdauds empesés par leurs bons sentiments. Sur ce thème, je n'en ai lu aucun proposant une réflexion aussi radicale que celui de Percival Everett qui secoue et amalgame plusieurs genres littéraires.

    De la satire sociale et du polar, donc, mais mâtinés d'un horrifique comique totalement dingue qui se déploie à mesure que l'enquête avance ou plutôt se cogne à l'irrationnalité des situations avec ces cadavres qui disparaissent et réapparaissent jusqu'à se multiplier. J'ai souvent pensé aux films de Jordan Peele ( Us et Get out ) ou sa série Lovecraft Country qui recourent au surnaturel pour décrire l'expérience afro-américaine du racisme avec un à-propos réjouissant. Cette note d'étrangeté parcourt tout le récit alors qu'il reste à majorité réaliste.

    Percival Everett frappe juste là où il aurait pu se vautrer. Son intrigue est menée avec une énergie folle et un humour macabre jubilatoire qui distille une puissante sensation de malaise et des rires embarrassés. Mais on rit franchement face à la charge comique des jeux de mots, du choix des noms et prénoms des personnages, et surtout de certains scènes-farces : une assemblée du Ku-Klux-Klan ( dont les membres pleurent la belle époque des croix enflammées et des gâteaux préparés par les mamans pour l'après fiesta ) ou une réunion à la Maison blanche avec un Trump d'anthologie ).

    On rit jusqu'à ce que cela fasse mal. Châtiment est une comédie très noire qui prend au sérieux la gravité de la question du racisme. Percival Everett réexamine avec acuité la notion de culpabilité collective et la façon dont elle s'envenime en l'absence de justice et de sanctions pour les auteurs de crimes racistes, jusqu'à réclamer vengeance ou voir apparaître un fantasme de vengeance sanglant.

    Le choix de la ville de Money n'est pas un hasard, c'est là qu'a eu lieu le lynchage le plus tristement célèbre de l'histoire américaine, en 1955 : celui du jeune Emmett Till, quatorze ans. Cette parabole raciale brillante pique ainsi encore plus puissamment les consciences et rappelle le besoin de réparation mémorielle ravivé par les récentes violences policières qui ont donné naissance au mouvement Black Lives Matter..

    Et quand surgissent les noms, sous forme de liste sèche, des victimes de lynchage depuis le début du XXème siècle, l'émotion jaillit, inattendue, dans ce roman incendiaire tout le temps surprenant. La résolution polar en devient presque secondaire ( même si je regrette tout de même un peu qu'elle soit moins convaincante que le chemin qui l'a amenée ).

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  • L'ironie n'est-elle pas plus appropriée que les larmoiements et le manichéisme pour dénoncer le racisme ? En refermant « Châtiment », finaliste du prix Pulitzer en 2022, la réponse positive.
    Dans une Amérique contemporaine où le Président à la tignasse orange conduit la destinée d'un pays plus...
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    L'ironie n'est-elle pas plus appropriée que les larmoiements et le manichéisme pour dénoncer le racisme ? En refermant « Châtiment », finaliste du prix Pulitzer en 2022, la réponse positive.
    Dans une Amérique contemporaine où le Président à la tignasse orange conduit la destinée d'un pays plus fracturé que jamais, deux frères sont successivement retrouvés morts, atrocement mutilés et châtrés.
    À leurs côtés se trouve le cadavre d'un homme noir qui ressemble étrangement à Emmett Till, un adolescent noir lynché en 1955 par deux blancs parce qu'il aurait mal parlé à une femme.
    Des décennies plus tard, les coupables vont payer. Et ils ne seront pas les seuls.
    Des dizaines de rednecks méchants, bas du plafond, incultes, vulgaires et aux convictions racistes intactes vont en effet figurer sur la liste des prochaines victimes.
    À chaque fois, le modus operandi est le même et les meurtriers sont introuvables. Certains pensent même qu'ils seraient des revenants noirs de retour pour se venger de leurs bourreaux.
    Inutile de dire que les forces de l'ordre vont avoir quelques difficultés à résoudre l'enquête.
    Parmi elles, deux flics africains-américains qui débarquent chez les suprémacistes blancs de Money, une bourgade du Mississippi, comme des chiens dans un jeu de quilles.
    Dans une écriture aux accents « tarantinesques » qui fait aussi penser aux aventures du « Bourbon Kid » (Sonatine) par sa réjouissante démesure, « Châtiment », sous ses allures de farce allégorique, dénonce le racisme systémique qui gangrène les États-Unis depuis ses origines.
    Je remercie Babelio et Actes Sud pour cette lecture stimulante.

    EXTRAITS
    Quand on veut connaître un endroit, on parle à son histoire.
    C'est un repaire de péquenauds débiles qui sont restés bloqués au XIXe d'avant-guerre et offrent la preuve vivante que la consanguinité ne conduit pas à l'extinction.

    http://papivore.net/litterature-anglophone/critique-chatiment-percival-everett-actes-sud/

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