"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
J'ai déjà lu avec grand plaisir un livre de Tecia Werbowski, Chambre 26, et je pourrais reprendre quasiment mot pour mot mon billet. Non pas sur le contenu du livre, mais sur la forme. Charme désuet d'une écriture intemporelle, on pourrait même croire à un récit se passant au 19ème alors qu'il est très actuel (il y est question d'euros, de CD, de lettres datées de 1998), personnages décalés dans leur époque, et contexte également décalé : voyage en train express, robes de soirées, musique classique, salons de thés (même si Maya Ney ne se refuse pas un grog de temps en temps), femme d'un certain âge qui se verrait bien en détective. Tout cela concourt à donner un rythme et un fond très particuliers. Un peu Agatha Christie évidemment. Un soupçon de Stefan Zweig dans la forme. Le style est policé, poli, élégant, sans omettre au détour d'une ligne un "Qu'est-ce que c'est que ce bordel ?" (p.23) lancé par une femme de la bonne société.
La première partie, Franz Schubert Express, est écrite à la première personne du singulier contrairement à la seconde (Gustav Mahler express) écrite à la troisième personne. Sincèrement, je préfère Franz Schubert (pas la musique, je suis totalement ignare en ce domaine), le "je" donne un côté plus proche de Maya, on est elle qui se pose des centaines de questions sur son interlocutrice, ou alors c'est l'histoire qui est mieux, plus intéressante. Le procédé de changement de point de vue me plaît bien, on peut ainsi se rendre compte facilement de la différence d'un récit en fonction du narrateur, différence de ressenti, d'interprétation, de projection.
Pas vraiment des polars au sens strict du terme, plutôt des petits romans à l'esprit policier qui se lisent agréablement pour les histoires qu'ils racontent et pour l'écriture de Tecia Werbowski. Deux intrigues qui forment un livre de 88 pages, l'auteure étant spécialiste des petits romans dans lesquels le superflu est ôté pour ne laisser que le nécessaire. On pourrait regretter que l'intrigue ne soit pas plus développée, que T. Werbowski ne donne pas plus de corps à ses personnages, mais en y regardant de plus près, Maya est bien plus qu'esquissée et on connaît tout de l'histoire de Clara Brau. Alors pourquoi s'encombrer de détails inutiles ? Moi, j'aime ces formats courts, efficaces, que l'on peut emporter et lire rapidement en toutes circonstances (ou presque). Ne boudons pas notre plaisir !
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