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J'avoue, je ne sais pas quoi penser de cette lecture. Je ne sais pas si j'ai aimé ou non. Même si j'ai été jusqu'au bout car intrigué par le déroulement de l'histoire. J'ai même eu l'impression que je lisais de plus en plus vite, suivant le rythme infernal imposé par l'action et le fourmillement de cette gare.
L'histoire est vraiment intéressante en soi. Comment l'amour peut impacter tout un monde. Ici, l'amour est à sens unique et détruit ses protagonistes. Mais elle détruit aussi l'environnement dans lequel ils évoluent, la gare.
L'auteur offre alors plusieurs lectures de son récit. Une histoire d'amour obsessionnel et destructeur. Une histoire de gestion d'entreprise. Une histoire de crise sociale. Les trois s'imbriquent et se complètent bien jusqu'au dénouement final.
Visuellement, on est sur un style particulier qui lui aussi peut dérouter. Tout paraît si immense, les pièces de vie, la gare, mais même le lit conjugal. Les compositions suivent la relation du couple, cadre serré quand il sont proches, et plan large quand ils s'éloignent. Rien n'est laissé au hasard.
"La gare" est un ovni de plus déniché par l'éditeur, perturbant mais intrigant.
"Ils savent tout de nous. Nos déplacements, nos goûts, nos faiblesses... Mieux que nous-même. Ils ont 12 longueurs d'avance sur chacun de nos coups. Chaque caméra est un de leurs millions d'yeux, chaque fois qu'on croit choisir de tourner à gauche ou à droite, c'est une de leurs millions de mains qui a attiré notre attention par là... "
La gare est titanesque, c’est une ville, une société, un monde dans lequel la foule surgit, s’engouffre, et tourbillonne. C’est un système monstrueux et tentaculaire, qu’il faut diriger d’une main de maître, et c’est là qu’intervient la directrice, omnipotente, elle gère et fait vivre le lieu. Mais il va y avoir un couac, au sein de cette organisation tentaculaire, il suffira d’un battement de cœur pour tout dérégler. La directrice est tombée amoureuse, et elle est prête à tout pour retenir son amant dans ses filets, quitte à user de sa toute-puissance pour l’emprisonner dans la gare. Et là tout s’effondre, la gare se désorganise, les investisseurs s’affolent, les syndicats s’agacent, mais la directrice obnubilée par cet homme est devenue aveugle à tout cela.
Le récit s’avère nettement plus riche que je ne l’avais imaginé, entre cette histoire d’amour destructrice et l’univers dystopique de la gare, les sujets abordés sont larges. L’amour de la directrice est dévorant, au point de tout détruire sur son passage, y compris elle-même. On trouve aussi une critique de la société capitaliste, qui surveille et contraint tout en créant des inégalités. Le pouvoir de la directrice et des dirigeants sur la foule est autoritaire et totalitaire. Cette foule est un flot, une vague que l’on ne laisse pas libre de déferler, il faut la surveiller, la diriger et la contrôler. Tout ceci donne une réelle profondeur à l’histoire.
Graphiquement, c’est très intéressant, le découpage qui brise les cases et le jeu sur les échelles de grandeurs permettent de donner à la gare tout son aspect titanesque et écrasant. C’est surprenant au départ, mais très plaisant
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