"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Jusqu’où sa tendance naturelle à l’obéissance peut-elle amener l’être humain ? Comment expliquer les exactions commises en temps de guerre par des soldats par ailleurs bons fils, bons pères de familles et maris doux et prévenants ? Y a-t-il une sauvagerie, une perversion latente que les circonstances, les rapports sociaux ou certaines manipulations feraient apparaître ? Peut-on être contraint à la violence par simple principe d’obéissance, par soumission à l’autorité ? Dans les expériences de Milgam qui consistaient à envoyer des décharges électriques (virtuelles) à un élève donnant de mauvaises réponses, tous les sujets sont allés jusqu’à 285 volts, 12,5% se sont arrêtés à 300 volts, 20% entre 315 et 360 volts et 65% ont poursuivi jusqu’au bout, soit de 435 à 450 volts ! Cela donne une idée de la puissance de suggestion représentée par une simple blouse blanche dans un banal exercice universitaire. Diverses études ont montré que selon l’aspect de l’interlocuteur, selon sa présentation vestimentaire ou son statut social, il était plus ou moins aisé de se soumettre à son autorité. Ainsi obéira-t-on plus facilement à un personnage en uniforme, à un bourgeois en costume cravate, à un médecin en blouse blanche qu’à un clochard en haillons.
« Psychologie de la manipulation et de la soumission » est un essai psychologique intéressant, détaillé, s’appuyant sur de très nombreux travaux et au bout du compte très universitaire. L’auteur s’évertue à analyser les causes de la soumission d’un individu à un autre. Il analyse longuement une manipulation qu’il baptise « Pied dans la porte » qui consiste à demander un petit effort à quelqu’un avant de lui en demander un plus grand. Ou l’effet « Porte dans le nez », exact contraire du précédent. Le manipulateur fait une demande exorbitante, bien sûr refusée, pour pouvoir en placer une plus acceptable. Et ça marche alors que la réussite est bien moindre sans ces deux manœuvres. Il aborde également, mais un peu trop brièvement, tout ce qui concerne la culpabilisation. Il prouve également l’extrême importance du non-dit, du geste (un simple toucher de la main ou du bras, même furtif, peut changer la donne), du regard (extrêmement important pour la confiance) et du sourire qui fait immédiatement entrer en empathie. Rien sur les manipulations par la peur. D’une lecture un peu laborieuse en raison de la multiplication des exemples et des études, cet ouvrage reste cantonné aux comportements sociaux, aux rapports individuels, aux petits gestes du quotidien (donner plus ou moins de pourboire, signer ou non une pétition, rendre un service ou non, etc.) Le lecteur restera sur sa faim sur les manipulations de masse, la propagande médiatique, les « psyops », les travaux des cabinets dits « de conseil », des instituts de sondages et autres narratifs soigneusement distillés par les différents pouvoirs pour manipuler et soumettre à une bien plus grande échelle.
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