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Que faire de sa liberté lorsqu'on est né esclave et que l'on se retrouve soudain face au vertige de la Liberté ?
Que fait-on et où va-t-on lorsqu’on est soudain affranchi après une vie d’asservissement dans la même plantation ? Comment dispose-t-on de sa liberté quand il faut reconstruire jusqu’à son identité-même, dans une société aux mentalités sudistes encore intactes qui ne vous y reconnaît aucune place, aucun droit, et surtout pas celui d’y trouver un emploi ? Leur émancipation à peine proclamée en ces lendemains de guerre de Sécession, les deux frères Prentiss et Landry acceptent le travail que, plongé dans la douleur et le désarroi parce qu’il pense son fils mort à la guerre, le fermier voisin de leur ancienne plantation leur propose sur ses terres, au grand dam des habitants de la petite ville d’Old Ox, en Géorgie. Les esprits sont dans un tel état d’échauffement qu’un rien pourrait bientôt suffire à mettre le feu aux poudres...
Entre espoirs et désillusions alors que la défaite sudiste bouleverse leur vie et les entraîne vers un inconnu à l’évidence plus hostile qu’accueillant, c’est la peur au ventre que les anciens esclaves abordent ce qui, en fait de statut d’hommes libres, ressemble plutôt désormais à un grand vide. Les uns partent tenter leur chance dans le nord, amorçant un long périple vagabond pendant lequel il leur faudra trouver moyen de survivre. Les autres s’entassent encore dans des campements de fortune, désemparés et indécis. Les forces d’occupation nordistes ont beau commencer à occuper le terrain pour y asseoir la paix, l’atmosphère est explosive, alimentée par la colère et la rancoeur des planteurs qui, convaincus de n’avoir perdu qu’une bataille, ne pensent qu’au retour de l’ordre ancien. Qui ose s’entremettre entre blanc et noir se retrouve au ban de la ville entière, la peur aux tripes face à la menace de terribles représailles.
C’est de cet impossible rapprochement entre les deux bords que vont faire les frais la non-conformiste famille Walker et ses deux protégés, très vite exposés à la vindicte générale dans une dramatique escalade de violence dont personne ne sortira indemne. Allant crescendo dans un déchaînement de péripéties pleinement crédibles mêlant lynchage, incendie et chasse à l’homme dans la touffeur humide d’une nature luxuriante, la narration nous fait toucher du doigt les racines de la ségrégation raciale aux Etats-Unis. Finement campés dans leurs plus infimes déchirements et contradictions, les personnages y prennent vie et épaisseur avec une parfaite justesse. Et c’est avec un immense plaisir que, subjugué par la maturité et la maîtrise de ce premier roman souvent très cinématographique, l’on s’accorde à son rythme soutenu, entrecoupé de beaux passages plus amples, empreints de réflexion et de nature-writing.
Un très beau et puissant roman, sur les prémices d’une liberté que l’on aurait tort de croire acquise par simple décret anti-esclavagiste… Coup de coeur.
Au lendemain de la Guerre de Sécession, deux frères Prentiss et Landry, anciens esclaves dans une plantation de coton de Géorgie, sont abandonnés à leur sort et vivent leurs premiers instants d’hommes libres, terrés dans la forêt comme des animaux.
Mais à deux pas de leur ancienne ferme, ils croisent la route de George, un propriétaire terrien oisif qui les recueille et se découvre, à leur contact, un but dans la vie.
Refusant la pression sécessionniste de leur petite ville d’Old Ox, George et sa femme Isabelle, qui ont perdu leur fils à la guerre, apportent aux deux jeunes affranchis, un amour et un respect qu’ils n’ont jamais connu.
Malgré les souffrances endurées, les deux jeunes hommes vont se construire doucement, se découvrant des goûts et des envies, bien décidés à profiter de leur nouvelle liberté.
L’auteur nous offre de magnifiques personnages portés par leur force de caractère et une intarissable volonté d’aller de l’avant. Ce ne sont pas des héros mais des hommes et des femmes comme tant d’autres, avec leurs faiblesses et leurs blessures, capable de sacrifices comme de lâcheté, mais pour lesquels j’ai éprouvé tellement d’empathie.
Quels moments déchirants passés à leurs côtés, à trembler, à me réjouir, à douter et finalement à y croire, comme portée par l’espoir communicatif qui émane de ce morceau d’Histoire.
Avec ce premier roman, Nathan Harris nous plonge dans la difficile période de l’après-Guerre Civile, lorsque l’armée de l’Union occupait les terres sudistes pour faire appliquer les lois d’une nouvelle Amérique où l’esclavage venait d’être aboli. Le parcours de ces deux affranchis retrace à lui seul toutes les grandes problématiques de cette fin du 19ème siècle, l’ancrage de l’esclavage, l’enrôlement des hommes et la naissance, dans la douleur, de la communauté afro-américaine.
Un superbe roman qui révèle un grand écrivain digne des meilleurs auteurs de la littérature américaine.
La guerre de Sécession (1861-1865) vit ses dernières heures. Elle aboutit à la victoire de l'Union face aux Confédérés et à l'abolition de l'esclavage. En Géorgie, au sud des États-Unis où se déroule « La Douceur de l'eau », cette émancipation juridique va-t-elle conduire à une réelle libération des Noirs ?
Les personnages de Prentiss et de son frère Landry vont illustrer le combat des Afro-Américains pour devenir des citoyens comme les autres. La première difficulté pour ces anciens asservis est de trouver un travail rémunéré.
Prentiss et Landry auront la chance de rencontrer George à qui on vient d'annoncer la mort de son fils à la guerre. Cet homme tolérant saura les accueillir. Lui et sa femme Isabelle, aussi ouverte d'esprit, forment un duo détonnant dans cet environnement raciste, bien-pensant et persuadé de son bon droit. Pourtant, ils se sont éloignés l'un de l'autre et vont trouver dans la défense des opprimés un nouveau départ pour leur couple.
En choisissant la fiction pour raconter une page de l'histoire de ses ancêtres, Nathan Harris a nourri de son imagination la complexité d'une société dominée par des Blancs incapables de considérer les Noirs comme leurs égaux.
Avec une vraie puissance romanesque, parfois gâchée par quelques maladresses dans l'expression, il nous fait vibrer aux aventures de ses héros si touchants par leur humanité.
Magistralement narrée par le primoromancier, la fracture originelle entre les deux communautés continue à marquer les mentalités.
http://papivore.net/litterature-anglophone/critique-la-douceur-de-leau-nathan-harris-philippe-rey/
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