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Nous sommes dans les années soixante, une jeune femme, Lara, vient d’intégrer la prestigieuse Académie des Arts de Prague pour devenir scénariste. La sélection est dure mais elle réussit à suivre les cours du célèbre Roman Kantor, professeur dont l’aura est telle que ses étudiants, heureux d’avoir été choisis, se laissent peu à peu entraîner dans une relation dominant-dominé, et sont prêts à tout pour satisfaire le Maître.
Lara n’échappe pas à la fascination et noue avec Kantor une relation ambigüe mêlant admiration, et attirance sensuelle, ce qui la conduit à accepter tout et n’importe quoi, le Maître étant exigeant, faisant travailler ses étudiants sur des scenarii qu’il n’hésite pas à s’attribuer.
On comprend très vite que derrière Roman Kantor, se cache Milan Kundera et que le récit est largement autobiographique puisque Natalia Borodin a suivi l’enseignement de Kundera.
On revisite, avec ce récit l’histoire de la Tchécoslovaquie depuis les années soixante à la chute du Mur de Berlin, et la séparation entre République Tchèque et Slovaquie en passant par les espoirs du Printemps de Prague violemment réprimée avec l’entrée des chars soviétiques.
L’auteure nous donne de belles pages sur le Printemps de Prague, les chars, l’exil, l’asile politique, le visa avec lequel l’héroïne est partie pour fuir le Régime qui lui vaut une condamnation à la prison car elle n’est pas rentrée.
Natalia Borodin nous livre un récit très intéressant, photographie d’une époque, d’un pays, insistant au passage sur l’animosité pour ne pas dire la haine actuelle entre Slovaques et Tchèques, qui n’était pas perceptible avant, mais elle déclare quand même avoir été snobée au moment de son inscription à l’Académie, car elle n’était pas née à Prague et vient de la partie slovaque.
J’ai apprécié aussi la rencontre entre Roman Kantor et l’auteur américain Philip R. ou encore Garcia Marquez ainsi que la fascination de l’héroïne pour Luchino Visconti entre autres.
La relation d’emprise qu’exerce Roman Kantor sur ses étudiants m’a heurtée par son côté parfois franchement toxique, mais que Lara accepte, de même que les autres étudiants, les hommes comme les femmes d’ailleurs.
S’il avait fait une invite à un élève ou à une élève, tous l’auraient suivi sans ciller, et auraient accepté tout de lui : discours délirant, humiliation, acte sexuel déviant, violence, injustice…
Un grand merci à NetGalley et aux éditions du Cherche Midi qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteure.
#LescenariodePrague #NetGalleyFrance !
https://leslivresdeve.wordpress.com/2023/06/17/le-scenario-de-prague-de-natalia-borodin/
L'auteure s'est largement inspirée de sa vie, derrière l'imposante et impressionnante figure de Roman Kantor se cache, en partie, celle de Milan Kundera, dans ce qui était encore la Tchécoslovaquie. C'est une jeune Lara, slovaque, qui débarque de Bratislava, enfant unique, que nous allons suivre pendant plus de quarante ans. Depuis Prague, et sa célèbre Académie du film, jusqu'à la France et les Etats-Unis, dont elle prendra les nationalités, via la Belgique, l'Italie et l'Allemagne.
Pour replanter le contexte, le département de cinéma de l'Académie des arts du spectacle à Prague, ou FAMU, fut l'une des plus prestigieuses écoles de cinéma au monde, une note de bas de page précise qu'Orson Welles aurait dit qu'elle était la seule à l'époque à pouvoir enseigner le cinéma. Elle a connu son âge d'or pendant les années soixante alors que Milan Kundera y fut professeur de littérature (1954-1969), il y a lui-même étudié l'écriture et la réalisation de scénario. Milan Kundera que l'on retrouve d'un bout à l'autre du roman, comme mentor de la jeune étudiante qu'est Lara et de ses camardes du département de scriptwriting. La désignation de mentor est, à mon sens, un faible mot compte tenu de l'admiration, de la vénération passionnée quasiment, que l'ensemble de ses élèves lui vouaient, et Lara en premier lieu. Lara, c'est une jeune Slovaque qui débarque à Prague, qui ne parle pas le tchèque natal de l'ouest du pays et qui va devoir s'imposer, en premier lieu dans l'université, largement aidé par Roman Kantor : cette première prise de contact sera le départ d'une relation qui ne s'arrêtera pas aux portes de l'école de cinéma pragoise mais qui se poursuivra jusqu'au pays d'adoption de la scénariste slovaque.
Ce fut aussi fascinant de suivre le parcours estudiantin de Lara, d'abord au sein d'une école où les effectifs ont été sélectionnés avec soin, une élite en quelque sorte destinée à devenir le cinéma de demain, et au sein d'un pays, fermé, qui se trouve de l'autre côté du rideau de fer. Il faut dire que l'apprentissage que leur accorde Roman Kantor, l'un des plus grands auteurs du pays de l'époque, est tout sauf académique pour un cours sur l'apprentissage scénaristique, largement décrié, et d'abord par lui-même plus tard, mais adoré par ses élèves : l'une de leur tâche était de poursuivre une œuvre littéraire en empruntant le même style que l'auteur. On se laisse prendre au jeu de revivre ces années de travail et de passion, d'immersion complète dans le cinéma, évidemment le récit est ponctué de cette multitude de références qui envahissent la vie quotidienne des étudiants de l'école tchèque, avec pour notre narratrice, un culte spécial à Visconti et Suso Cecchi d'Amico. Si les seules œuvres cinématographiques qui me sont familières se limitent à La Mort à Venise du réalisateur italien Luchino Visconti, et l'inoubliable La Beauté du diable avec Gérard Philippe, le récit a su éveiller ma curiosité sur d'autres titres et d'autres réalisateurs qui m'étaient inconnus.
Ces quelques années, passées à l'école, sont passionnantes à lire, et c'est surtout le monde dans lequel ces jeunes cinéastes en herbe évoluent : Lara évolue avec, ou en dépit de l'évolution politique de son pays, blotti derrière un rideau certes invisible, mais qui maintient fermement closes ses barrières, ses citoyens en son sein. La situation de Roman Kantor, interdit de publier sous son véritable nom, poussé à l'exil de par ses prises de position, éclaire sur la nature du régime qui étreint la Tchécoslovaquie. L'autre partie du roman débute ainsi dans l'exil de Lara en France, qui d'une simple année devient un exil permanent, condamnée par contumace à de la prison si tant est l'idée lui revenait de revenir dans son pays. C'est cette condition d’exilée, de réfugiée, de déracinée, d'apatride, qui est touchante dans ce récit, la jeune femme devenue reniée par son pays qui va se dissoudre en son absence, comme ses parents vont s'éteindre sans qu'elle ne les revoie jamais. Car, à partir du moment où elle va devenir sans pays, il s'agira pour elle de se construire dans cet ailleurs choisi, France, Belgique, Etats-Unis, et avant de pouvoir exercer son art, il s'agira de gagner sa vie. Si la première voie qu'elle ait trouvée, c'est à l'image de Roman Kentor l'enseignement, par lequel elle deviendra un double féminin de son ancien professeur, écoutée et admirée par sa cour d'élèves. Sa réalisation, et ce jeu de mots vous est offert amicalement de façon tout à fait inopportune, c'est par la rencontre de ses idoles, les réalisateurs italien et polonais, Walerian Borowczyk, les acteurs. Et j'imagine, écrire un récit en un français parfait, qui n'a rien à envier à d'autres auteurs francophones. Dans ce scénario de Prague, l'auteur américain Philippe R., joue son propre rôle, aucun pseudonyme pour l'écrivain qui apparaît bien sympathique dans tout l’ego américain qui est le sien. (...)
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