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Voici un petit roman découvert dans le cadre de l'Intime Festival de Namur, un OVNI littéraire, une plume qui claque, qui fuse, qui scotche - dans les deux sens du terme, impossible de le lâcher avant la fin, et à lire en compagnie d'un bon whisky (vous comprendrez à la lecture !).
N est un loser magnifique, un anti-héros, qui ne fait rien de sa vie à part boire et lire des romans noirs. Boire oui !, mais au bistrot jamais sans un livre. C'est un écrivaillon raté, un affabulateur, il aime s'inventer des vies, un genre d'épave raté qui un jour, pense que cela peut changer.
Il y croit vraiment lorsqu'il rencontre Irène, une quadra de quinze ans de plus que lui, opportuniste, il s'incruste, l'aime-t-il vraiment ? Les histoires d'amour finissent mal en général ... Il a envie d'y croire, mais un mensonge, un autre et c'est l'engrenage, la violence et la folie.
Au début du récit, le juge Guyader a arrêté un jeune homme accusé du pire en découvrant en ligne le journal de N qui l'accuse. Un journal rédigé en "tu", une confession émaillée de références cinématographiques, musicales et littéraires. Comme le dit la quatrième de couv, entre Bukowsi, Jim Thompson et Simenon.
Un récit à la plume aiguisée, percutante, sensible, c'est drôle.
Quelle plume ♥, à suivre !
Ma note : ♥♥♥♥
Les jolies phrases
Les amours ratent, mais de peu, c'est ainsi que commencent les suivantes. Peut-être que nous en avons trop en nous, quoi qu'on dise, et il faut que cela sorte.
Retour à la cour. Tu fumes une cigarette en pensant au désastre universel. Ici, tu n'es pas le plus mal barré. Le malheur des autres rassure et ces mesquines pensées te dépriment. Mais l'être humain est ainsi, n'est-ce pas ? Toujours à haïr le bonheur des autres, à ignorer le sien et à aimer le désespoir de son prochain. C'est le problème d'être ici, on pense à vide, à rien, on philosophe, puisqu'il n'y a rien d'autre à faire.
Tu penses à ce que tu as perdu, toi qui n’as pas souvent gagné. Si la réussite c’est d’aller d’échecs en échecs, ton heure ne devrait pas tarder. Tu écris tes pensées délirantes d’une illisible écriture. Ta vocation : l’écriture. C’est un mensonge, tu le sais. Tu n’es pas davantage fait pour l’écriture que pour le saut à la perche. Seulement, c’est la seule activité que tu pourras pratiquer en prison.
Tu lui envoies un message : « Tu es une suite ininterrompue de gestes réussis. » Tu as repéré l’absence de bouquins chez elle, hormis quelques Pierre Rabhi et autres merdes du genre. Elle ne peut donc pas savoir qu’il s’agit d’une phrase de Nick Carraway dans Gatsby.
https://nathavh49.blogspot.com/2024/10/une-trajectoire-exemplaire-nagui-zinet.html
Ça commence mal pour N. Pas d’argent, pas de travail, pas d’amis. À vingt-cinq ans, il n’a encore rien accompli. Quelques nouvelles tout au plus, même pas un roman, même pas un meurtre. Il traîne son amertume et son alcoolisme dans les rues de Lille, toujours un bouquin à la main et une insulte aux lèvres. Un soir, dans un bar quelconque, il rencontre Irène, pianiste, bourgeoise, un peu vieille.
Il s’installe chez elle, si naïve, si accueillante. “Elle prépare du thé. Tu n’aimes pas le thé. Elle sort des biscottes. Tu n’aimes pas les biscottes. Elle sort du jus de pamplemousse. Tu ne savais même pas que ça existait.
— Ça te va ?
— Parfait.
Voilà, elle commence comme ça, l’histoire.”
N. raconte tout ça dans son journal, rédigé à la deuxième personne du singulier et bêtement publié sur un blog. “Tous les matins, tu as l’impression de commencer une partie de scrabble avec sept consonnes.” Dans des chapitres courts et lucides, tachetés de dialogues expéditifs, on se promène avec ce sale type. Et on grimace, mais on sourit aussi, devant toutes ses conneries. Ses soirées qui finissent tard le lendemain, son alimentation à base de lait, de bière et d’anxiolytiques, ses putains de digression, ses vieux livres, ses vieilles chansons… “Un tissu de mensonges, de délires, où parfois la vérité a réussi à s’accrocher”, dans lequel fouille Guyader, le juge d’inscription en charge de l’affaire N.
Parce qu’évidemment, ça se termine mal pour N. - entre autres -, après ces cent pages à lire cul sec.
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