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Une véritable découverte ! Quand on me parle d’art mexicain, je pense immanquablement aux Toltèques, Mayas et autres Aztèques. Ou alors bien plus proches de nous, il y Frida Kahlo, Diego Rivera et les peintres muralistes, et encore plus contemporain, Gabriel Orozco et sa célèbre DS.
Mais de culture Huichol, je n’avais jamais entendu parler. Ce fut donc avec beaucoup de curiosité que j’ai commencé la lecture de cette monographie. Son auteur, Michel Perrin, est un ethnologue reconnu pour ses études sur le chamanisme, une croyance basée sur la médiation entre les hommes et les esprits. Et ce fut une plongée dans un monde inconnu, esthétiquement fascinant par bien des aspects.
Les huichols sont des amérindiens vivant très au sud, jusqu’aux confins de la Sierra Madre occidentale, au Mexique. Le premier chapitre nous les présente : les différentes tribus, leur conception de l’espace, les lieux rituels et l’organisation politique. Le second est consacré à la religion et aux figures dominantes de cette mythologie fortement teintée d’animisme. Le troisième est, quant à lui, réservé aux différentes techniques et moyens pour rendre visible tout ce monde invisible. Ce qui est une des qualités de l’art : rendre visible l’invisible. Et par la suite, sont analysés tous les signes récurrents de ces tableaux, très souvent de format carré. Nous y trouvons les éléments naturels (feu, pierre, soleil, etc.) associés au chamane et son entourage, aux animaux et aux plantes. Les mythes fondateurs et les rites (liés au peyotl, au cerf et au maïs) sont étudiés dans tout le reste de l’album.
Pourtant ce qui me frappe le plus après avoir fermé le livre, ce sont ces grandes compositions de plus en plus compliquées avec une multiplication de plus en plus effrénée des signes jusqu’à saturer tout l’espace du tableau. Toutes les formes arrondies, ondoient, vibrent comme plongés dans l’eau ; un monde grouillant de vie, éclatant de couleurs pures, à la lisibilité parfois ardue pour un œil occidental. Bizarrement, les amateurs d’art ethnique, voire d’art brut, trouveront des liens entre leurs œuvres préférées et celles des Huichols : même peur du vide, même stylisation extrême, même goût pour les courbes, même obsession pour la répétition du motif. J’ai même trouvé des accents de la culture huichole, accents bien inattendus, dans les œuvres de l’Allemand A.R. Penck. Ce qui, comme le concède Perrin dans les dernières pages, fait de ces tableaux une des expressions de la modernité, même involontaire.
Voilà donc une excellente introduction à cette culture et à ses personnalités marquantes, avant de visiter l’exposition, du 13 septembre 2014 au 11 janvier 2015 au MAAOA (Centre de la Vieille Charité) à Marseille.
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