Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Amir et son frère fuient leur pays en guerre, probablement la Syrie. Grâce à l'argent d'interprète gagné par l'aîné, les deux jeunes font appel à des passeurs pour aller en Europe.
Malheureusement, les deux frères sont séparés et, chacun de leur côté, vont tenter de trouver le chemin pour l'eldorado tant espéré...
Ce roman est celui des migrants, de ceux qui tentent une route longue, dangereuse pour trouver une vie meilleure.
Cet exil, qui leur est imposé par leur pays en guerre, est un voyage de froid et de misère.
L'auteur prend le parti de faire un récit immersif, au plus proche des sensations ressentis par les personnages. L'on ne saura que très peu d'eux, au final, mais on les accompagnera dans chaque minute d'agonie, coincé dans une voiture, ou s'échappant d'un centre de rétention.
La solitude, coupant le réconfort qu'aurait été la présence d'un frère, les obstacles qui se succèdent. La peur d'errer de ne pas savoir où l'on se situe, sans carte, ni téléphone.
Ce récit prend aux tripes, face également à l'absence d'empathie rencontrée sur la route. La stupidité et la xénophobie affligeant encore davantage les deux frères. Les rares exemples de sympathie sont plutôt des exemples d'égoïsme, cachés sous le vernis de la philanthropie, une publicité à peu de frais.
La fatigue du matériau, de ce corps poussé à l'extrême, comment pourrait-il en être autrement ? Il faut toujours avancer, malgré le froid, la fatigue et la faim. Ce corps, que peut-il faire ?
Ce court roman chamboule par l'immersion qu'il impose au lecteur, dans ce destin qui en d'autres lieux, d'autres temps auraient pu être le vôtre ou le mien.
Un excellent récit, nécessaire, pour nous rappeler que les migrants ne sont pas une masse, une simple expression entendu au J.T du soir mais des individus comme vous, comme moi.
Pour les amateurs cinématographiques, vous aurez probablement vu l'effrayant thriller "Esther" qui traite du même sujet, inspiré par un fait divers des plus étranges.
Et pour ceux qui n'aurait pas visionné ce film, attendez-vous à un choc.
Cela a été mon cas, je n'arrive toujours pas à assimiler cette incroyable histoire que les auteurs tchèques, qui étaient au coeur de l'actu, nous relatent.
Le scénario de Marek Šindelka et Vojtěch Mašek pour "L'étrange cas Barbora Š” :
Vous l'aurez compris, les auteurs n'ont pas tout inventé de leur scénario. Ils se sont basés sur la véritable et bizarre histoire de Barbora Škrlova.
Ainsi, de par le biais d'une enquête journalistique de la protagoniste, et avec un suspense démesuré et haletant, ils reviennent sur les évènements marquants de cette histoire.
Ils énumèrent et interprètent épisode par épisode les évènements afin d'essayer de donner du sens à cette sordide affaire.
L'idée de l'investigation de la reporter permet ainsi de dérouler, morceaux par morceaux, le fil de l'histoire, à mesure des découvertes de l'héroïne.
Les deux écrivains jouent évidemment beaucoup sur les rétrospectives pour conter le scandale.
D'un autre côté, ils focalisent aussi beaucoup les lecteurs sur l'aspect psychologique des faits, car le mobile pour de tels actes n'a jamais été trouvé.
A l'image de l'interprète, en avançant dans la lecture, vous allez être captivé par le récit mais surtout finir obnubilé, pour finir par vous poser la question: Mais que serait-il arrivé si le baby phone n'avait pas buggé, ou si le père de famille n'avez pas vu le baby-phone pendant les interférences ?
Et bien figurez-vous que même à cette question les auteurs y ont réfléchi...
De plus, outre le travail de "reportage", les scénaristes ont eu l'extrêmement brillante et merveilleuse idée d'y mêler une double intrigue dont l'héroïne devient victime...
Le final de la BD devient ainsi une apothéose psychologique phénoménale !
Ce mélange dramatique, psychologique, politique, sectaire, etc.…, tout en soutenant une certaine angoisse, est d'un délice intellectuel véritablement savoureux.
Le dessin de Marek Pokorný pour "L'étrange cas Barbora Š” :
Le dessin de Marek Pokorný est vraiment exceptionnel due à sa variété graphique tout du long du récit.
Son style varie selon si l'épisode raconté est actuel, passé, lié à l'enfance etc...
Pour ce qui est de l'enquête journalistique de l'héroïne Andréa, au présent, le style est réaliste avec un trait fin et fluide, bien détaillé portant beaucoup sur les émotions mais avec des couleurs à tendances froides afin d'accentuer l'angoisse, l'obsession et le mal-être.
Les faits racontés, donc au passé, sont relatés dans des tons sépia classiques pour illustrer l'antan. le trait est encore plus travaillé, fin et réaliste.
Il existe aussi des passages avec un style beaucoup plus enfantin et coloré pour accompagner la soi-disant "jeunesse" de Barbora Škrlova.
Bref, ce roman graphique de 208 pages, démontre d'un talent incomparable du dessinateur en terme de techniques de dessin.
On en prend plein la vue et cela attise d'autant plus la curiosité pour suivre l'évolution de l'histoire avec les procédés graphiques associés à chaque épisode.
Et il s'avère que tous les choix sont véritablement judicieux, et les compositions sont maîtrisées avec maestria jusqu'au moindre détail !!
Pour corser le tout, les choix de plan et perspectives sont audacieux et incroyablement diversifiés. Tout est travaillé admirablement.
Le découpage donne un rythme particulièrement haletant et soutenu, allant de la pleine page hyper détaillée au gaufrier de 48 cases simplifié.
A noter aussi l'incroyable réalisation de couverture, ou chaque case est un dessin indépendant, mais l'ensemble mis bout à bout révèle un personnage plutôt inquiétant.
Une véritable oeuvre d'art en soi.
J'ai rarement été bluffé par un tel travail.
Cette oeuvre prouve que Marek Pokorný a incontestablement sa place parmi les grands illustrateurs !
Cette BD a été élue "meilleure bande dessinée" 2018 en république tchèque
Cet ouvrage est l'un des meilleurs thrillers graphiques que j'ai pu lire à ce jour !
Petit tour dans l’univers de la bd tchèque avec un véritable thriller graphique L’étrange cas de Barbora S. du trio pragois Vojtĕch Mašek, Marek Šindelka et Marek Pokorný, publié chez Denoël Graphic. Étrange cas … doux euphémisme pour qualifier la fictionnalisation de l’affaire de Kuřim. Ce scandale qui, en 2007, défraya la chronique en République Tchèque est digne des meilleurs polars noirs nordiques et aurait pu être le sujet de la quatrième saison de Forbrydelsen ou la cinquième de Bron. Mais Andrea la journaliste obnubilée par l’affaire, prête à tout pour connaître la vérité n’est ni Sara Lund ni Saga Norén et si cette sordide histoire de maltraitance d’enfants impliquant également des hommes d’affaires, des politiciens et des artistes a été jugée et les coupables condamnés, les mobiles des protagonistes font encore de nos jours l’objet de nombreuses interrogations. Pédopornographie ? Dérives d’une secte religieuse d’extrême droite annonçant la venue d’un nouveau messie? Les deux à la fois ? Et qui tirait les ficelles ?
Mai 2007, une maison de banlieue en Tchéquie
Un homme vaque à ses occupations dans sa cuisine en jetant un œil distrait sur l’image renvoyée par la caméra de surveillance qui filme son bébé quand soudain apparaît à l’écran une fillette nue ligotée dans une cave. Il vient de capter par inadvertance des images en provenance du pavillon voisin. Coup de fil à la police, arrestation de Lucie la « mère adoptive » et de Tereza sa sœur, placement d’Anna, l’enfant, dans un établissement d’accueil dont elle s’enfuira le soir même. Au cours de l’enquête, véritable coup de théâtre, on découvre qu’en réalité Anna s’appelle Barbora et qu’elle n’est pas âgée de 12 ans mais de 33 ans. Elle sera arrêtée quelques mois plus tard en Norvège où elle se dissimulait sous l’identité d’un garçon de 13 ans, Adam. Une ombre plane tout au long de cette histoire : celle de Josep, le père de Barbora, ancien chef charismatique d’une troupe scoute d’obédience d’extrême-droite. Lui qui n’a jamais été inquiété, que ce soit pendant l’enquête ou le procès, quel rôle a-t-il joué dans tout ça ?
C’est cette effroyable histoire de maltraitance à multiples rebondissements mêlant usurpation d’identité, manipulation mentale, mysticisme fanatique qu’ont choisi de nous raconter les deux scénaristes au terme d’une enquête qui aura duré six ans. Conscients du risque de sombrer eux-mêmes dans le voyeurisme malsain, fonds de commerce de la presse à sensation, ils vont faire le choix de la fiction afin de protéger les véritables victimes, les deux fils de « Lucie » en les excluant du récit ainsi que les tortures infligées en se focalisant sur Anna/Barbora. Autre élément de fiction : le personnage d’Andrea la journaliste (incarnation de leur propre voyeurisme) qui va se trouver entièrement obsédée et possédée par son enquête allant jusqu’à mettre en danger son couple voire son équilibre mental. Alors bien sûr ce récit terrifiant et palpitant n’est pas linéaire mais suit les méandres de la psyché et de l’avancée des recherches d’Andrea.
Le titre français n’est pas sans rappeler « L’étrange histoire de Benjamin Button » (Tiens une histoire où le personnage principal rajeunit ...) ou « Une étrange affaire » , film de Pierre Granier-Deferre où, dans un autre registre, il est également question de manipulation mentale. Le titre original Svatá Barbora (Sainte Barbara) éclaire quant à lui la piste privilégiée par nos scénaristes.
Dès la première de couverture, on est sous tension : un gaufrier de 18 images dans une bichromie très froide de bleu/vert reproduisant des bribes de l’histoire qui, rassemblées, font apparaitre le visage d’Anna-Barbora en gros plan. Inquiétant ... Quant à la quatrième de couverture, représentant Anna pianotant de nuit sur son portable, elle est proprement angoissante.
Ce qui frappe avant tout dans cet album c’est l’originalité, l’extrême richesse, la dextérité graphique de Marek Pokorný, considéré comme l’un des meilleurs dessinateurs pragois actuels. Gaufriers classiques, pleines pages, map-mindings, mosaïques de minuscules vignettes vont s’entrecroiser tout au long de l’ouvrage. Il en est de même pour l’extrême variété des plans et du cadrage. Pour coller au mieux aux multiples chemins de traverse empruntés par les auteurs, il va se servir non pas d’un code couleurs, procédé dans l’air du temps quelque peu galvaudé mais d’un code graphique transcendant les atmosphères liées aux divers évènements. Il adopte un trait réaliste aux tons froids fourmillant de détails pour tout ce qui concerne l’univers d’ Andrea. Le passage concernant le camp de scouts est réalisé dans des tons sépia avec une formidable mise en scène et où les cadrages, plongées et contre-plongées rappellent l’esthétisme nazi d’une Léni Riefensthal. Le procédé graphique utilisé lors des épisodes consacrés à la prétendue jeunesse d’Anna, par ses couleurs plus vives en aplats ainsi que sa mise en page, nous fait songer à Chris Ware… Marek Pokorný prouve ici sa parfaite maîtrise des codes de la bd contemporaine. C’est carrément bluffant ! .
« Mais qui est le plus anormal, au fond : ces gens qui torturaient des enfants dans une cave, ou les dix millions d’«honnêtes citoyens» qui suivaient avec délectation leurs actes en direct au journal télévisé ? »
Loin de tomber dans les travers des tabloïds, ce roman graphique glaçant élu "meilleure bande dessinée" 2018 en République Tchèque soulève aussi la question du voyeurisme auquel les médias, vous, moi, n’échappons pas. Sa grande force réside dans le fait que malgré tous les éléments apportés, la personnalité de Barbora Škrlová demeure une énigme. Et la dernière image du livre est là pour nous le rappeler...
« L’équation a mille inconnues » est loin d’être résolue.
J’étais passé à côté de ce drôle de thriller tchèque sorti fin 2020.
Drôle car déconcertant sur le fond et dans la forme.
D’abord la forme car elle saute aux yeux dés les premières pages, une diversité impressionnante, une mise en page très libre, un récit maîtrisé mais aussi un côté un peu froid qui peut déranger.
Quant au fond, il s’agit avant tout d’un travail journalistique précis qui tente de relater des faits qui font froid dans le dos, tout cela mixé dans une fiction intéressante mais complexe. Juste un fait divers qui dérive dans un tourbillon sectaire fou et effrayant… Je ne suis pas sûr d’avoir tout compris, les auteurs laissent d’ailleurs planer le suspens en fin d’histoire, on n’aura pas toutes les réponses aux nombreuses questions que l’on se pose… manipulation, falsification d’identité, torture, fanatisme… autant d’ingrédients qui nous laissent sous le choc.
Au final un album ambitieux et riche dont l’histoire labyrinthique m’a parfois laissé sur le bord du chemin…
Il n'y a pas encore de discussion sur cet auteur
Soyez le premier à en lancer une !
Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
L’écrivain franco-vénézuélien Miguel Bonnefoy poursuit l’exploration fantasmagorique de sa mémoire familiale...
Des romans policiers à offrir ? Faites le plein de bonnes idées !
Nostalgique, nomade ou plutôt romantique ? Trouvez le livre de la rentrée qui vous correspond !