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On vous envoie un livre, vous l'ouvrez un peu par hasard et, dès les première pages, vous savez qu'il va se passer quelque chose.
Je ne connais rien au judo, je n'ai jamais entendu parler de la famille Lebrun mais l'écriture et le récit m'ont accrochée à eux.
Alors oui, c'est l'histoire d'un deuil impossible mais c'est surtout le journal d'un homme qui écrit : sa petite sœur, son fils, ses doutes, son frère un peu, son père beaucoup, sa famille recomposée, sa compagne çà-et-là, sa volonté de remonter sur la tatami, son quotidien et ses espoirs.
Dit comme cela, cela semble banal alors que c'est poignant.
L'écriture est sensible, ironique et drôlement émouvante.
La Grande Librairie est citée dans ces pages ; promis si Léo Lebrun est invité, je regarde l’émission en entier.
Un coup de cœur.
Le risque est grand de se heurter à des limites bien tangibles lorsque l’on décide de reprendre une activité sportive avec des ambitions de futur champion ! Le narrateur, qui a arrêter sa pratique du judo à la ceinture marron rêve d’achever ce parcours avec en ligne de mire le graal du grade : la ceinture noire. Mais rapidement ses articulations limitent ses ambitions. C’est l’occasion pour lui de revenir sur une enfance au sein d’une famille sportive puisque son père Frédéric Lebrun a été une figure de proue du judo national, avec David Douillet et Teddy Riner.
Récit autobiographique plutôt que roman, le texte nous immerge dans la vie quotidienne d’une famille dont la raison de vivre est le sport de haut niveau, mais relate aussi les sentiments et les émotions qui naissent à la fois de l’irruption des souvenirs mais aussi de ce que suscite le fait d’écrire :
« L'une des choses que j'ai préféré dans Yoga, est aussi l'une des choses que je préfère dans Céline, à savoir ce « truc du livre » en train de se faire. J'ai aimé l'histoire du devenir de ce livre, car il exprime bien ce que j'ai éprouvé lors de mes premiers mois d’écriture. »
Témoignage intéressant pour ce premier écrit.
280 pages Panseur 7 mars 2024
Le dojo de la vie !
Singulier, subtil, voici un premier roman qui dépasse largement ses grands frères.
Percutant, parfois insolent, libre, immensément libre !
« La bagarre » traque le réel, le dojo irrésistible de vérité.
La littérature est féconde et concordante avec une écriture qui claque sur les pages.
Confiante et absolue, surdouée de sincérité, sans crainte aucune.
L’enjeu est une prouesse. C’est un roman qui prend vie et ouvre la fenêtre et laisse venir ce qu’il y a de plus précieux pour la création : une langue neuve qui tisse un récit d’avant-garde.
Bouleversant, souvent, Tant Léo Lebrun semble en combat, en rivalité avec lui-même.
Chacune des phrases de ce roman magnétique est révélatrice. On plonge dans « La bagarre », l’inventaire du petit chariot posé près de lui. L’énumération, semblable à un voyage rituel. Ce livre échappe aux codes. On est en fusion dans plusieurs genres. L’identité-même de Léo Lebrun qui ose convier sa famille dans une trame qui, en plus d’être vitale pour lui, pour nous, accueille nos réflexions et nos interpellations.
Atypique, souvent triste et désenchanté par ses épreuves de bagarres mentales et de courage, ce livre est parfois grave ou malicieux.
Nous sommes au-devant de la parole qui reformule les tactiques sportives d’un écrivain sublime d’authenticité.
Léo Lebrun est judoka depuis sa plus tendre enfance. il a déposé son kimono depuis vingt ans.
La torpeur sidérante de l’ère du Covid le force à réfléchir. Il est à la croisée des chemins. Faire un pas de côté. Franchir la ligne et recommencer les entraînements. Décrocher enfin la ceinture noire, le Graal fécondant un nouvel être.
Dans un même tempo, écrire un livre sur le judo. Rendre hommage à son père, illustre judoka, « Mais toutes ces histoires ne suffiraient pas à le décrire. Ni en tant que père ni en tant qu’homme. Dans mes souvenirs de petit garçon, mon père n’est pas en kimono. Il est en salopette et enfourne un poulet...Il y a des poèmes dans des cahiers, des toiles qui sèchent dans le salon, des K7 sur la table…. Bien sûr dans mes souvenirs, il y a le judo, mais c’est finalement plus un décor, une toile de fond, qu’un leitmotiv. »
« Le travail, faut que ça soit une passion, sinon ça sert à rien, sinon, il faut changer. » « Mon père était moins proche de Marx que moi. »
Lui aussi écrit. « … Et l’un d’eux est là, sur le chariot dans un grand cahier Oxford à couverture rigide. »
Ce livre fronton qui témoigne et élève sur le piédestal une famille liée au sport. Le père, le fils, la fille, la mère complice. « Lalou a eu le malheur d’être forte. L’aura d’un samouraï dans un corps de gamine. »
Le judo serait donc une affaire entendue, innée, sauf que c’est l’épicentre même de cette famille. Plus qu’une passion, une éthique. Mais Léo décroche. Annonce à son père, l’arrêt du judo. « Rien ne pouvait être pire que ce silence. Et mon père a dit : Tu as lu Le Vieil homme et la Mer ? »
Il faudra attendre vingt ans avant de recommencer les prises, l’effort, les tactiques, et l’endurance. La blessure incommensurable, les genoux qui cèdent face au titanesque de la reprise. L’alarme, et un petit chariot lourd d’une histoire de vie. Quid des souvenirs, des livres et des carnets à spirale. Il tient sa ceinture noire en main, résurgence et un décorum médical qui cède la place à une renaissance en advenir.
« J’ai pensé à écrire beaucoup de livres. » « la bagarre c’est la bagarre. Est-ce uniquement une question d’ego ? »
La sociologie d’un sport de combat, l’exutoire d’u homme essoufflé de lui-même. Ce livre est un mémorial, un flambeau d’exemplarité. On aime les pistes en début de chapitre « J’ai écrit un roman bonbon avec du Picon sur les doigts. »
Les signaux, « la vie est cruelle et les sports de combat sont aussi cruels que la vie peut l’être. »
On aime cette langue frappée comme un glaçon. Les anecdotes et cette fusion volcanique qui fait trembler la trame-dojo.
Ce roman est un hymne pour le judo. Les valeurs théologales, riches et estimables.
« L’enclave de lumière . »
Judicieusement politique, tiré au cordeau, ici, règne un style qui n’a pas fini de nous éblouir. Le pouvoir d’un auteur remarquable et déjà sur le piédestal d’une renommée.
Publié par les majeures Éditions du Panseur.
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