"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Ancien étudiant de cinéma à La New York Uinversity, Laurent Tirard aurait beaucoup aimé que de prestigieux anciens élèves de son université viennent y donner des cours mais ce ne fut jamais le cas. Après avoir interviewé le tout jeune James Gray pour « Little Odessa » pour « Studio Magazine » et appris que ce dernier donnait également des cours à l’école de cinéma de UCLA, le journaliste décida de s’offrir et d ‘offrir aux lecteurs les master-classes qui lui avaient tant manqué sous la forme d’interviews qui seraient publiées dans la revue où il officiait.
Anis naquirent les « leçons de cinéma » qui durèrent 7 ans et mirent 39 réalisateurs à contribution. Laurent Tirard n’avait pas prévu d’en faire un livre au départ mais cela lui fut suggéré par Tim Burton himself, excusez du peu ! Il parut en premier lieu aux Etats-Unis sous le titre « Moviemakers’ Masterclass » en 2002 puis en France d’abord en deux volumes en 2004 et 2006 puis dans une intégrale en 2009. Il s’agit ici de la réédition de cette dernière.
Les questions (non retranscrites) sont les mêmes pour chacun d’eux car il apparut rapidement à l’auteur que « l’aspect le plus fascinant de ces entretiens étaient la façon dont ils démontraient que chaque metteur en scène a une solution différente au même problème et qu’ils ont tous raison » (p.11). le projet se heurta parfois à la disponibilité des réalisateurs mais il parvint à ses fins pour 39 des 70 auteurs qu’il avait sélectionnés. Chaque entretien est introduit par un portrait du réalisateur (par un photographe de « Studio Magazine ») et se clôt sur une bibliographie actualisée. L’interview, plutôt concise, ne dépasse pas une dizaine de pages pour chacun. On est donc loin de la référence en la matière le « Hitchcock par Truffaut » qui fait 500 p mais c’est une plaisante mise en bouche !
Si le cinéma américain domine (Martin Scorsese, David Lynch, les frères Coen, Sydney Pollack, Arthur Penn, Michael Mann…), les cinéastes français (Claude Sautet, Jean-Pierre Jeunet, Jean-Luc Godard, Matthieu Kassovitz, Jacques Audiard, Claire Denis…), espagnols (Pedro Almodovar), allemands (Wim Wenders), italiens (Bernardo Bertolucci), danois (Lars Von Trier), japonais (Takeshi Kitano), chinois (Wong Kar-Wai, John Woo), ou slaves (Emir Kusturica) ne sont pas en reste.
Cet ouvrage a donc deux ambitions. La première est pédagogique : à travers les nombreux conseils distillés par les metteurs en scène interrogés, la direction d’acteurs, le placement de la caméra, le montage, ou le découpage technique sont ainsi décryptés dans le détail. Les réponses des uns et des autres se font écho , se complètent et finissent par former une sorte de manuel du réalisateur à mettre dans toutes les mains . On comprend alors pourquoi ce livre est conseillé dans les écoles de cinéma et fait désormais partie de la bibliographie de NYU par exemple ! La seconde est plus artistique : laurent Tirard souligne l’originalité de chacun et ce, paradoxalement, à travers des problématiques techniques. Ainsi, le choix d’une focale ou la façon d’aborder une journée de tournage s’affirment comme des spécificités décisives qui sont autant de considérations sur l’art cinématographique. Les réalisateurs interrogés reviennent sur leur parcours artistique et montrent la cohérence de leur œuvre et de leurs valeurs. Certains ont d’abord travaillé dans l’animation (Jean-Pierre Jeunet, Tim Burton) et soulignent communément l’intérêt de cette formation dans l’apprentissage des règles du cinéma ; d’autres ont été animateurs radios ( Inarritu) et mettent ainsi en avant l’importance du son et de la captation de l’attention de l’auditoire ; d’autres y sont venus presque par hasard (Arthur Penn) ; certains étaient auparavant journalistes cinéma (Chabrol, Wenders) ou sortent d’école prestigieuses (Jean -Jacques Annaud) tandis que d’autres enfinsont tombés dedans quand ils étaient petits (Jacques Audiard, Mathieu Kassovitz).Ils révèlent leurs maitres et leurs influences et d’ailleurs, il n’est pas rare que les plus jeunes des interviewés prennent les plus anciens comme modèles !
Ces interviews sont donc passionnantes ! Un petit conseil : je ne lis pas « les leçons de cinéma » de façon cursive mais je pioche , depuis que je l’ai reçu, dans ma DVDthèque chaque soir et avant de regarder le film choisi, je lis la master-class de son réalisateur. Et croyez-le ou non c’est très éclairant ! On revoit vraiment l’œuvre sous un nouveau jour avec la délicieuse impression d’être initié ! Je ne suis ni critique, ni étudiante en cinéma mais simple cinéphile. Cette anthologie m’apporte beaucoup et je remercie à la fois Laurent Tirard, Les éditions nouveau monde et Babelio de m’avoir permis de découvrir cet ouvrage que je juge essentiel…
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