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Ce beau et sobre roman à la puissance inattendue, écouté en version audio, rend hommage au terroir et met en lumière les femmes qui, hier comme aujourd’hui, se battent pour échapper aux violences conjugales et retrouver leur liberté.
Dans les années 60, une famille vit dans une ferme isolée de la vallée de la Santoire, dans le Cantal. Le père produit du Saint-Nectaire, la mère s’occupe du foyer et élève les trois enfants. Le mariage célébré quelques années plus tôt est devenu un mauvais souvenir : celle que l’autrice nomme Elle a vite déchanté au sujet de cette vie de famille idéalisée : le mari violent la dénigre, lui impose les coups, les injures et les relations non consenties. Ses pensées reviennent sans cesse la hanter, pourtant elle le sait, il vaut mieux ne pas y songer et faire comme si de rien n’était. Elle se tait, car dans ce milieu, il n’est pas coutume de se plaindre. Et puis, celles qui sortent du chemin, on les montre du doigt, elles deviennent l’objet de railleries et de ragots… Après la naissance de ses trois enfants, elle compare son corps à celui d’un bovin et survit à un quotidien dans lequel elle ne prend aucun plaisir. La voir s’effacer comme cela est un crève-coeur pour le lecteur car personne ne semble la prendre en compte, faire attention à ce qu’elle est et à ce qu’elle ressent. Il s’agit de la version audio, j’ai trouvé que le ton impérieux de Véronique Vella convient parfaitement à ce personnage féminin qui est partagé entre la résignation et l’indignation.
Il est beau de la voir trouver la force de se rebeller. Au milieu des années 70, après plusieurs années de violences conjugales qui l’ont épuisée, elle décide, ELLE DECIDE, de quitter cet homme qui ne la mérite pas et parvient à prendre son envol. A cette époque, le divorce est une procédure assez rare, surtout dans ce milieu paysan. L’autrice nous laisse ensuite découvrir le point de vue du mari qui se retrouve seul à gérer la ferme, sans femme et enfant, et quasiment sans regret, comme s’il avait juste quelques bêtes de moins à nourrir. Un cataclysme pourtant dans ce monde rural, mais un exemple à suivre dans chaque milieu social.
Ce récit est d’une grande pudeur. L’écriture de M.H Lafon est âpre comme la terre, simple, sans fioriture mais elle va droit au coeur comme le gel à pierre fendre. Cette vie là a été vécue maintes fois, toutes époques confondues et l’est encore de nos jours. Ce livre est une leçon de vie, pour que n’importe quelle femme qui se croit anéantie, retrouve quelque chose en elle de profondément enfoui, une source qui ne s’est jamais tarie, une force qui tient à la fois de la prise de conscience et de la quête libertaire.
Les sources, la source, le terme poétique est privilégié ici aux « racines » si rigides pour désigner la famille, celle qui emprisonne, qui empoisonne. Toutefois cela évoque également l’hérédité familiale, dont on se souvient comme d’une loyauté. Cette femme a été aimée lorsqu’elle était enfant par sa famille, ses parents, c’est peut-être de cette source d’affection là qu’elle tire la force de se battre, une énergie qui contre toute attente va pulvériser la violence conjugale dont elle est victime.
Comme il est beau de voir cette femme se redresser et prendre fièrement le dessus sans se soucier du quant dira t-on ni du lendemain! Parce que c’est ainsi ou bien on y laisse la vie. Il y a mourir physiquement et aussi mourir psychologiquement. Et aucune femme au monde ne devrait jamais oublier que l’on a toujours le choix.
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