"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Des espions bien tordus dans des guerres très actuelles, des personnages attachants et ambigus à la fois, de l’amour bien chaud dans des environnements bien froids, que demande le peuple-lecteur ? Il aura tout cela avec Rouge cendre et plus encore : une écriture enlevée et une intrigue suffisamment alambiquée pour tenir en haleine et faire parfois douter. A quand une adaptation, film ou série ?
Le titre colle parfaitement à l'urgence incandescente de ce premier roman qui oscille entre thriller sentimental et roman d'espionnage. Les deux personnages principaux, qui vivent une passion amoureuse, sont fortement campés avec un caractère tranché.
Esteban est photo reporter de guerre et surtout agent secret envoyé au début du roman en Irak pour une mission à haut risques contre ISIS ( acronyme anglo-saxon de Daesh, « Islamic State in Irak and Syria » ). Un mâle alpha sans doute trop stéréotypé, évoluant peu sur le fil de son stéréotype, imprévisible, violent, possessif. le personnage de Manon est beaucoup plus réussi car lui, on le voit évoluer avec une vraie complexité dans les réactions. Journaliste à l'AFP, elle est exténuée par le poids de son amour pour Esteban, de son absence. Elle décide de partir dans les contreforts des Balkans en Bulgarie, loin de tout, dans une nature qui est censée l'apaiser et lui permettre de sortir de cette emprise amoureuse qui l'empoisonne.
Lorsqu'Esteban, rongé par la jalousie, décide d'utiliser un logiciel espion pour la suivre à distance depuis l'Irak, le roman bascule dans un engrenage impitoyable. Autant la trame sentimentale est lisible, autant la trame espionnage avec le zéro limite des Russes du GRU ( les services de renseignements de l'armée russe ) m'a nettement moins convaincue car je l'ai trouvée peu crédible. J'ai souvent perdu le fil sans pour autant avoir eu l'impression de ne pas être concentrée.
C'est d'autant plus dommage que le thriller sentimental est bien mené. Porté par une écriture à l'esthétique soignée, le lecteur ressent la sensualité de ces êtres à la conscience éveillé par le contact du combat Bien / Mal. La façon qu'ont Esteban et Manon de vivre leur histoire d'amour et de sexe est aussi excessive que la violence du monde contemporain qui surgit de partout dans leur quotidien de par leur profession. Rien n'est fade, tout est piquant et ardu.
Manon est journaliste à l'AFP. Elle rencontre Esteban, photographe et agent secret, sur une mission et ils tombent amoureux l'un de autre. Les déplacements d'Esteban pèsent de plus en plus à Manon qui s'inquiète lourdement lors de ses longues absences. Petit à petit le monde lui semble de plus en plus absurde, elle décide de partir s'isoler dans la nature en Bulgarie.
Ce roman s'épanche longuement sur le traitement de l'information, la vitesse à laquelle tourne le monde, les missions à l'étranger, espionnage, mais aussi le sentiment amoureux, les relations disfonctionnelles et à distance etc ... Et l'entrée dans le vif du sujet se fait un peu attendre, je me demande même en refermant ce livre qui la promesse annoncée est vraiment tenue.
Ce roman raconte plutôt pour moi un expérience, celle de s'isoler et d'en regarder comment le vivent chacun des membres du couples et d'observer ce qu'ils en deviennent, sous fond certains d'actualité, d'information et de conflit.
Les personnages qui se veulent avoir un caractère fort finissent par être bien fade et manquent de subtilités et le style d'écriture n'est pas fluide et part par moment dans des digressions qui desservent plus qu'autre chose.
Peut-on vivre normalement lorsque les images de guerre et de violence prédominent ? Journalistes, photographes, ils sont les premiers témoins de scènes indicibles, avec une appréhension du monde qui en est forcément changée. Et impacte leurs relations aux autres. Julie Manarra nous en offre deux spécimens incandescents. Manon et Esteban. Ensemble depuis un coup de foudre survenu lors d'un reportage à Milan autour d'un repenti de la mafia. Pour l'AFP, Manon joue les reporters, Esteban les photographes. Mais pour lui, c'est une couverture. Car Esteban est également membre des services secrets, engagé sur les terrains de guerre, souvent au Moyen Orient sur les traces d'Isis alors que les cendres des attentats qui ont dévasté Paris sont encore fumantes. La passion qui les unit est aussi brûlante que douloureuse, résultante d'une conscience aiguë des dangers qui les entourent. Alors qu'Esteban part pour une très longue mission, Manon décide de prendre du recul, de laisser le bruit et la fureur de côté pour un temps. Elle prend le chemin des Balkans, destination une cabane isolée dans une forêt des Carpates. Mais peut-on vraiment ignorer le monde à l'heure de la surveillance généralisée ?
J'ai beaucoup aimé le ton de ce roman qui nous ramène à l'actualité - la guerre, les russes, ça vous dit quelque chose ? - parvient à englober son intrigue dans une atmosphère à la fois réaliste et sublimée, tout ceci sans se prendre trop au sérieux en ne négligeant pas le second degré comme en témoigne ce dialogue : "- Dan ! On n'est pas dans un James Bond / Il la toisa / - Non. Dans un John Le Carré ou un SAS. D'ailleurs je te verrais bien en couverture !". Clin d’œil à cette littérature de genre dont l'autrice a bien assimilé les codes tout en conférant à son texte un ancrage terriblement contemporain par son contexte géopolitique, le questionnement sur les dérives destructrices de l'humanité ou encore l'abus de technologies. Si Esteban est l'archétype de l'espion viril, le personnage de Manon est plus subtil, complexe, inspirant dans son envie d'autrement et son boycott des béquilles technologiques à commencer par le GPS. Quant à l'AFP, je ne voyais pas cet organisme comme un nid d'espions, va falloir que je me renseigne.
Du noir rougeoyant, hautement inflammable. Chaud à tous les niveaux. Et qui finit par laisser penser que la compagnie des loups est plus sécurisante que celle des hommes. Premier roman, joli coup.
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