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Gian Marco Griffi, dans son roman « Chemins de fer du Mexique » nous entraine dans une folle épopée qui conduit son héros Francesco Magetti (Cesco) en une quête complétement absurde.
Notre pauvre Cesco membre de la Garde nationale républicaine ferroviaire d’Asti dans le Piémont, en cette Italie de 1944, se retrouve à mener à bien une mission plus que délicate et complétement saugrenue. La guerre n’est-elle pas non plus une grande farce à l’image de cette mission ? Qu’est-ce qui pousse les hommes à se mettre sur la g…. ?
Imaginez plutôt, l’ordre que son Adjudant-Chef lui a intimé, malgré son étonnement personnel : « je dis que je n’ai pas la moindre idée de la raison pour laquelle tu dois rédiger un document sur les chemins de fer du Mexique. Je reçois des ordres de quelqu’un qui a reçu des ordres de quelqu’un qui avant lui a reçu des ordres de quelqu’un d’autre qui a reçu des ordres. Peut-être y a-t-il quelqu’un en haut qui a connaissance de la raison pour laquelle il est absolument vital de rédiger un document sur les chemins de fer du Mexique….. Le bruit a couru jusqu’aux oreilles du Führer ou aux oreilles de Goebbels, lequel a décrété que posséder un plan détaillé des chemins de fer mexicains, pour le Reich et ses alliés, était une question de vie ou de mort ». Par la suite, on en apprend un peu plus, il s’agit de retrouver une localité où se situerait « l’arme résolutive » permettant d’envahir le Mexique et de se lancer à la conquête des États-Unis. En fait une simple envie expansionniste.
Il faut expliquer, pour mieux comprendre ce roman, la situation dans le nord de l’Italie à cette époque. Pour l’Italie, alliée en début de conflit de l’Allemagne, les choses se gâtent avec en juillet 1943 le débarquement des américains en Sicile. L’arrivée des américains a pour conséquence la chute de Mussolini et la reddition de l’Italie qui demande un armistice et déclare, même, la guerre à l’Allemagne en octobre 1943. Toutefois, en parallèle, Mussolini emprisonné s’évade et crée la République Sociale Italienne (RSI) sur un territoire couvrant le nord et le centre du pays de septembre 1943 à avril 1945 (dont, bien entendu, Asti et le piémontais où se situe l’action). La RSI est, naturellement, sous protectorat allemand.
Revenons à notre Cesco, membre par désœuvrement, de la Garde nationale républicaine (et donc fasciste malgré lui) ferroviaire, qui doit mener à bien sa mission dans un environnement anxiogène. Il se rend à la bibliothèque où, peut-être, il pourra trouver une source de documentation. Notre jeune homme y fait la rencontre de Tilde, la bibliothécaire, qui le subjugue et deviendra bien vite sa « déesse chimérique », elle lui fait part de l’existence d’un livre « Historia poética y pintoresca de los ferrocarriles en México » qui pourrait contenir des éléments de réponse et l’aider à établir le plan des lignes de chemins de fer. Commence alors une course poursuite pour récupérer ce fameux ouvrage, insaisissable, qui file de mains en mains et donne matière à des rencontres avec divers personnages insolites.
Ah, j’oubliais, comble de malchance notre héros traine une rage de dent qui complique ses recherches et préfère « brûler le mal » par l’alcool au lieu de rendre visite au dentiste auquel il voue une peur irrépressible. Décidément, rien ne va dans cette chiennerie de vie !
Roman ubuesque, picaresque, singulier qui dépeint admirablement le marasme de cette région en 1944. Sur un ton, humoristique, parfois satirique, Gian Marco Griffi égratigne les politiques, les religieux et s’interroge sur le poids de l’humain, en tant qu’individu, baladé dans les tourments de l’histoire. Malgré, parfois, un certain hermétisme dans l’expression, Cesco, par ses peurs, sa naïveté, ses doutes nous émeut et nous pousse à tourner les pages pour savoir, enfin, s’il pourra fournir ce fameux plan des Chemins de fer du Mexique.
Un grand merci aux Éditions Gallimard et bravo à sa collection « Du monde entier » qui nous fait voyager sous des plumes de divers horizons.
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