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C’est parce que j’ai reçu ce livre que je me suis intéressée à cette femme « de couleur » qui fût l’une des plus grandes contraltos de son époque. Toscanini, venu l’écouter parlera « d’ une voix comme on n’en entend qu’une par siècle ».Albert Einstein lui offrira l’hospitalité à chacun de ses passages à Princeton. A Moscou, Staline aurait assisté en cachette à son récital. En 1939, elle bénéficiera du soutien de la first lady Eleanor Roosevelt quand le Constitution Hall de Washington, seule salle assez vaste pour l’accueillir la refusera « white artists only », alors qu’elle venait de faire un triomphe dans les capitales du monde entier.
Revenons donc sur l’histoire de cette personnalité hors norme de la communauté Afro Américaine.
Marian Anderson est née en 1897 à Philadelphie d’une mère ,Anna, institutrice en Virginie, mais dont les diplômes ne sont pas reconnus en Pennsylvanie, et d’un père, John Berkley Anderson, manœuvre à la gare, elle décèdera en 1993. Devenue veuve à trente-cinq ans, sa mère trimera dans une usine de tabac, une blanchisserie et comme femme de ménage. Marian, quant à elle, récurera les marches extérieures des demeures du quartier pour cinq à dix cents par maison. A l’âge de huit ans, alors qu’elle fait partie du chœur enfantin de son église, elle est repérée. Jusqu’à l’âge de quinze ans, elle se produit dans des cérémonies, des offices religieux, des clubs et sociétés communautaires. Quand elle veut s’inscrire dans une école de musique afin de progresser, on la refuse et elle se heurte pour la première fois à l’obstacle de sa couleur. Elle suit alors Roland Hayes et Billy King sur différentes scènes du pays mais c’est en 1921, que, sous l’impulsion de Boghetti, son professeur, elle s’inscrit au concours organisé par le « Lewisohn Stadium de New York » qu’elle remporte haut la main et qui lui permet de se produire pendant la saison estivale lors de concerts en plein air. Le succès est immédiat.
Toutefois, la ségrégation sévit toujours, il faut organiser des concerts pour blancs puis pour noirs quand il n’est pas possible de mettre les blancs au parterre et les noirs aux balcons. Les hôtels n’acceptent pas Marian qui doit trouver l’hospitalité chez des membres des congrégations religieuses. L’Amérique est en récession économique et elle se rend rapidement compte, que pour avancer, c’est en Europe, capitale culturelle, qu’elle doit étudier . Elle y fait un triomphe , mais là encore, sa couleur est souvent un frein. Après quatre ans à sillonner l’Europe, son retour est accompagné de concerts également triomphaux, son succès européen l' ayant précédée . Mais là encore, sa couleur ne lui permet pas en 1939 de se produire au Constitution Hall de Washington. Eléanor Roosevelt va prendre fait et cause pour elle et un concert mémorable qui rassemblera 75 000 personnes est organisé en plein air devant le Lincoln Memorial, là où, trente ans plus tard, Martin Luther King prononcera son célèbre « I have a dream ».
Marian Anderson devenue l’icône des droits civiques, chantera lors de l’investiture de Kennedy après avoir ouvert la voie à toute une génération de chanteuses noires. John Fitzgerald Kennedy lui décernera ,quelques jours avant d’être assassiné, la plus haute distinction la « Presidential Medal of Freedom ». Des douzaines d’universités l’élevèrent au rang de Docteur Honoris Causa. Un timbre et une médaille furent frappés à son effigie. En 2016, le président Barak Obama avait décidé de la faire apparaitre sur les nouveaux billets de cinq dollars, l’administration Trump a mis ce projet sous le boisseau.
En plus de raviver le souvenir d’une cantatrice d’exception, c’est toute l’histoire XXème siècle qui est convoquée dans ce livre, la ségrégation et la lutte pour les droits des Afro Américains, la guerre froide, la montée du parti national socialiste d’Hitler en 1930…
C’est en écoutant, pour mon plus grand plaisir, la voix envoutante, chaude et puissante de Marian Anderson que j’ai rédigé cette chronique .
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