"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Quelques jours après ma lecture, je dois avouer que seule la première nouvelle m'est restée en mémoire. Quelle riche idée, en effet, d'imaginer un tel traducteur.
Des autres nouvelles, dont le thème principal est l'argent, il ne me reste pas grand chose : un président qui dort, un poète sans le sous...
J'en attendais plus.
Le titre de cette nouvelle me semblait plein de promesses, et je ne me suis pas trompée, ce recueil a été un coup de coeur. Ce bouquin dénombre onze nouvelles, qui ont toutes pour personnage principal Kornél Esti. Bien d'autres nouvelles, non inclues dans ce recueil, complètent ce tableau qui suit les aventures de ce personnage singulier qu'est Kornél Esti. Vous les trouverez publiées chez les Éditions Cambourakis, affiliées aux Éditions Actes Sud, qui d'ailleurs font un tacle en règle à leur collègue pour le choix des nouvelles totalement subjectif et a priori peu respectueux de l'oeuvre d'origine. Ils affirment sur leur site que son oeuvre comptait 18 chapitres et relevait davantage de l'ordre du roman, certes épars, que du recueil de nouvelles. Bref si vous voulez lire la totalité des nouvelles, allez donc voir du côté de cette édition de Kornél Esti, qui a le mérite de publier une oeuvre plus conforme à la publication d'origine. En outre, le site vous propose même le pdf gratuitement! Pour en revenir à l'objet de cet article, c'est en 1933, trois ans avant sa mort, que Dezső Kosztolányi publie l'histoire de Kornél Esti, alors même qu'il est touché par la maladie.
Le recueil est assez court, à peine 150 pages, pourtant il contient onze nouvelles, certaines très brèves, longues d'à peine deux ou trois pages, d'autres plus longues. Toutes ont en un commun, un premier narrateur, dont nous ignorons tout si ce n'est le fait qu'il est écrivain et qui évolue au sein d'un groupe d'autres compagnons d'armes artistes, dont la voix unique est portée par Kornél Esti, second narrateur, qui est cependant le prédominant. Ce dernier serait, selon Péter Ádám, l'un des traducteurs et auteur de la postface de mon édition, un double de notre homme de lettres hongrois, travailleur acharné, mais solitaire invétéré contrairement à notre Kornél Esti.
Ces nouvelles se présentent toutes sous le même schéma: le premier narrateur s'efface bien vite au profit de Kornél Esti qui prend et monopolise la parole. Il se met alors à exposer un épisode incongru dont il a été témoin, ou dont il a pris part, qui prête quelquefois à rire, ou qui amènent à compatir au sort des personnages. le ton est volontairement trompeur, facétieux, presque badin, à la fois désopilant et insolite, on s'y laisse prendre, évidemment, à cette légèreté affectée. Mais on comprend très vite que cette indolence révèle plus qu'elle ne dissimule une propension à révéler cette fatalité qui colle à la peau de ces personnages, au destin inéluctablement scellé. Bien souvent le rire provoqué par l'auteur cache des sentiments autrement plus profonds, une sensation de malaise perturbante, persistante, car le rire n'est jamais gratuit avec l'auteur. L'humain est l'essence même de ces nouvelles: ses vertus, ses vices, surtout les vices, sa singularité, ses contradictions, ses déviances, ses passions, qui l'entraînent souvent au bout de lui-même, aux frontières de son existence, au fin fond de la ville – Budapest – lorsque il est trop tard pour une autre chance, cette deuxième, troisième ou même dernière chance. Dezső Kosztolányi, par le biais de Kornél Esti relève, passe à la loupe, étudie les incohérences du caractère des hommes, fait état de sa nature profondément contradictoire, ce qui fait de lui un être inconstant, puisqu'il n'a même pas la force de ses convictions pour lui. Ce sont des portraits sans concessions, ou même si l'homme peut être coupable de cupidité, sa méchanceté, de malice, le narrateur lui-mêle désabusé, spectateur à la fois conscient et blasé de ces faiblesses, ne s'abaisse jamais à condamner ses congénères, n'émet jamais de jugement ou critique péremptoire et blessant à son prochain, bien au contraire. Et c'est cette manière de procéder, que j'ai apprécié, il ne cherche pas à condamner les individus, tel n'est pas son rôle d'ailleurs mais au contraire il essaie de les réhabiliter au sein de sa société, que sa condition d'écrivain lui a permis d'observer inlassablement, de disséquer, de la coucher par écrit afin de la comprendre. Il ne condamne jamais, il ne fait jamais que d'essayer de débrouiller et comprendre des esprits complexes, difficilement saisissables.
Traduites du hongrois, ces onze nouvelles se déroulent dans la Hongrie des années 30. Onze nouvelles dans lesquelles, Kornel Esti, le personnage principal raconte des histoires à ses amis, petits contes philosophiques tous plus loufoques et absurdes les uns que les autres.
Un traducteur à la cleptomanie si aiguë qu'il ne peut s'empêcher de faire disparaître argent, bijoux ou propriétés du texte qu'il doit traduire... Un poète hérite d' une fortune dont il ne sait quoi faire car il veut continuer à vivre modestement, et use de mille subterfuges pour parvenir à se débarrasser du trop perçu... Un voyageur qui ne sait pas un mot de bulgare parvient à soutenir une conversation dans cette langue avec un contrôleur de train... Quelque part existe une ville où tout le monde met un point d'honneur à ne dire que la vérité, rien que la vérité, toute la vérité. La vie en est-elle plus agréable ?...
Une observation attentive, désabusée et bienveillante des comportements humains à travers de bien étranges petites histoires...
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