"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Après le récit publié aux Belles Lettres, André Hébert a construit un scénario de bande dessinée où la première personne domine, faisant de cette histoire un témoignage fort et précis. Tout au long de la narration, le lecteur est dans la tête du narrateur, d’André, de cet homme dont le militantisme se confronte aux foncières du pays et du monde actuel. On sent l’envie d’engagement monter en lui et révéler des possibilités d’action inattendues. On bascule rapidement dans une autre réalité, ce qui explique facilement la difficulté du protagoniste à revenir en France et aux préoccupations classiques. Il y a l’expérience de la guerre et du combat. La bande dessinée est plus psychologique et théorique (au sens de la réflexion politique) bien qu’André soit sur le terrain et les scènes de combat. La tension est palpable de bout en bout malgré les différents changements de lieux ou de sections au sein de l’YPG (Unités de protection du peuple – en kurde – branche armée du Parti de l’union démocratique kurde en Syrie).
Le propos de l’auteur est renforcé et porté admirablement par la mise en scène et le trait semi réaliste de Nicolas Otero. Dessinateur de la série Amerikka et du récent La Cellule, on retrouve son sens du détail et cette manière d’ancrer directement le lecteur dans le présent du récit. L’angle choisi est toujours ingénieux, ouvrant un champ entre la fiction et le documentaire. Les décors transpirent toute leur complexité. Au milieu de ces champs de bataille, les personnages expriment une certaine impassibilité (Nicolas Otero est un dessinateur impressionnant pour capter l’ennui, l’attente, ces moments de perdition avant la violence) mais aussi des expressions brutales. Les sentiments quand ils parvient à sortir des êtres nous sautent aux yeux qu’il s’agisse de la peur, de la colère ou d’un simple sourire. Ainsi il laisse, dans sa mise en scène du récit, vivre des portraits marquants de ses soldats de la liberté.
André Hébert est un militant actif. Lorsqu'il décide de rejoindre la Syrie pour aider les kurdes de Rojova contre Daech, il n'en parle pas à sa famille.
Véritable témoignage d'un combattant français parti à la guerre, cet album est une véritable mine d'informations.
Personnellement, je n'avais jamais entendu parler de cette résistance kurde dans ce territoire. Ce témoignage m'a donc appris ce qui se déroule dans la région de Rojova. Basé sur des faits réels que l'auteur a vécu, cette bande dessinée s'apparente à un reportage documentaire qui nous met face à des combats totalement ignorés et tus de nos médias. André Hébert est un jeune homme courageux qui se bat pour ses convictions et c'est très beau.
Il faut ajouter à cela le magnifique graphisme de Nicolas Otéro.
La lecture est prenante, il m'a été difficile de lâcher ma lecture. J'aime quand j'en sors avec de nouvelles connaissances. C'est le cas pour celle là.
Un très grand merci à #NetGalleyFrance et aux éditions Delcourt pour l’acceptation de ma demande de lecture.
La BD peut aussi faire écho à des témoignages poignants et apporter ainsi un éclairage quasi documentaire sur un évènement historique. Dans "Jusqu'à Raqqa", André Hébert témoigne de son engagement en Syrie contre l'état islamique.
Il nous explique d'abord les origines de son engagement politique puis sa décision de partir, de choisir l'action, sans vraiment réaliser ce qui l'attend. Juin 2015, c'est le départ, le mensonge à la famille, et l'arrivée sur place.... intégré au YPG (unité de protection du peuple), il va suivre un long entraînement, des cours de kurde, avant d'être envoyé sur le front. Une première expérience faite d'attente, d'ennui.
S'en suivront diverses expériences, dans une unité internationale, dans un groupe de sabotage ... un retour en France et un nouveau départ inévitable tant l'inaction lui pèse...Cette fois, en juin 2017, il s'agit d'aller libérer Raqqa, ville symbole de la présence de Daesh.
Cette expérience est évidemment passionnante mais aussi dure, violente... Le dessin de Nicolas Otero (La cellule) ne peut éviter certaines scènes difficiles, il accompagne le récit à la première personne avec un trait noir et réaliste. L'ambiance est parfois lourde, pesante, anxiogène.
En épilogue, une carte et deux textes viennent en appui de l'album éclairer la situation de Raqqa depuis sa libération. André Hébert nous raconte aussi son "après", son retour à la vie en France pour clore un album témoignage marquant.
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