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"Splendeurs et fureurs" de Christina Stead, le livre indescriptible de la rentrée

"Splendeurs et fureurs" de Christina Stead, le livre indescriptible de la rentrée

Ce livre est un ovni : figurez-vous une Emma Bovary made by Jane Austen, qu’André Breton aurait fini par kidnapper, pour lui faire vivre sa grande histoire dans un Paris de l’entre-deux guerres repeint par Gustave Moreau. Vous obtenez Splendeurs et fureurs (ed de l’Observatoire) un petit chef d’œuvre encensé par la critique américaine la plus exigeante, et une auteur, Christina Stead  portée aux nues par des écrivains comme Jonathan Franzen.

 

Si son héroïne est anglaise, londonienne même, Christina Stead est australienne. Née en 1902, elle s’est éteinte en 1983 après une vie mouvementée et une vingtaine d’oeuvres, dont L’Homme qui aimait les enfants, son plus connu. Splendeurs et fureurs est son roman le plus intrigant publié en 1936, qu’elle a sans doute écrit après avoir lu Joyce, tant l’influence d’un récit extravagant subtilement contrôlé par la langue est prégnant.

 

Venons-en au roman qui commence en 1934, quand Elvira, 29 ans, quitte Londres pour rejoindre son amant Oliver qui en a 24 et étudie à Paris. Une folie ? Peut être. C’est ainsi qu’elle passera le livre à osciller entre deux mouvements : retourner chez un mari aimant, mais plus âgé, pour mener une vie confortable mais terne à ses yeux, ou tenter l’aventure et la précarité avec cet homme plus jeune qui lui fait des serments d’amour si enflammés. Trop, peut être, mais si agréables à entendre.

 

Le roman se déploie pendant quelques mois suspendus, un peu irréels, dans un tourbillon de rencontres, au cours desquels toutes les illusions romantiques se déconstruisent. Il y aura des hommes vénéneux, des femmes ambigües, et beaucoup d’ironie. Le roman est construit par le dialogue, qui n’a pas l’ambition de dérouler l’action mais d’exposer l’humeur, l’atmosphère et la pensée de personnages pour le moins interlopes. Il y a ce représentant en dentelles, méphistophélétique, Malpurgo qui nous emmène dans les ambiances de Sar Peladan. Et puis Oliver, l’amant, embarrassé par sa fougue, producteur d’une poésie symboliste à la Moréas, tellement lamartinien dans ses élans.

 

Vous l’aurez compris, Splendeurs et fureurs se passe dans les années 30 mais leur tourne le dos, à commencer par son titre si austenien. Aucune allusion à la production littéraire et artistique du temps, aucun name dropping de poètes, jazzmen ou peintres de l’époque. Le roman est une ode à la littérature puissante du XIXe siècle, décadente jusqu’au surréalisme, desquels a jailli la puissance artistique de l’entre-deux guerres.

 

Les clefs du livre

Les femmes jouent un rôle important dans ce roman qui rappelle que le féminisme n’est pas né avec Beauvoir. Il y a Coromandel, une jeune femme talentueuse pour qui la vie ressemble à un réservoir de promesses plus belles les unes que les autres. Le personnage de Blanche, plus âgé, incarne la femme qui a perdu ces illusions. «  Une femme doit se battre pour tout, se battre ou comploter ». Et elle complote, et elle passe de bras en bras, survivant dans un Paris comme transfiguré par le pinceau du peintre Waterhouse. Au milieu, Elvira l’indolente qui a le luxe du choix mais l’amertume de savoir déjà qu’elle n’inventera pas sa vie.

 

Splendeurs et fureurs est une plongée désenchantée dans l’âme humaine qui n’épargne ni les hommes ni les femmes, et montre que toute leurs gesticulations, la force donnée à leurs rêves ne servent à rien puisque l’homme est régi par des forces structurelles plus fortes, économiques, culturelles, et contraint par sa nature profonde.

 

Tout cela serait désespérant, schopenhaurien, si, guidées par une plume érudite mais légère, l’ironie et la folie ne s’emparaient du roman. On vous le promet, vous n’aurez jamais lu un texte semblable.

 

Christina Stead, Splendeurs et fureurs (ed de l’Observatoire) Traduction  de Lori Saint-Martin et Paul Gagné

 

Retrouvez  Splendeurs et fureurs de Christina Stead, par Karine Papillaud sur CNews dans #Viveleslivres

 

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