C’est du fond de sa prison qu’elle nous livre ses confessions. Nadège Solignac.
« Je suis dans cette cellule en attendant de savoir ce que le destin a prévu pour moi. Non que je sois inquiète, il m’a trop souvent éprouvée pour que j’aie encore peur de lui. Je suis confiante : ils ne trouveront rien, car, mis à part cette erreur, j’ai toujours veillé à ne jamais semer de petits cailloux sur mon chemin. J’attends simplement que les juges ne se trompent pas sur la qualification de ce qu’on me reproche : ce que je vais faire de mon temps en dépend. »
Et c’est du fond de cette même cellule qu’elle nous raconte sa vie. De sa non tendre enfance à aujourd’hui. Ses souffrances. L’absence d’amour et de bienveillance dont elle a été victime pendant tant d’années. L’ignorance la plus absolue dont sa famille, ses proches, ont fait preuve vis-à-vis d’elle. Un chemin semé d’embûches, qu’elle s’est efforcée de suivre, à sa manière… en se forgeant la personnalité de celle qu’elle deviendra, que vous allez découvrir en faisant sa connaissance. A la naissance de sa petite soeur, que la vie n’épargne pas en lui infligeant un très lourd handicap, Nadège s’enfonce encore, chaque jour un peu plus.
« J’ai 8 ans et ma mère vient de mourir. »
Vivant à l’écart des siens, sous le même toit mais loin d’eux, il n’y a pas d’attache. Rien. Son père est-il vraiment son père ? Sa soeur, qui sera appelée « le monstre » n’aura pas plus sa place au sein de ce qu’il est difficile de nommer cette famille. Elle a bien un frère, aux abonnés absents, lui aussi.
« Affolé de devoir assurer la garde du monstre, mon père la plaça en moins d’une semaine dans une institution. »
Nadège joue un rôle. Le rôle de son propre personnage. Celui qu’elle bâtira de toute pièce, qui fera d’elle ce que les autres voudront qu’elle soit. Se fondre dans le décor. Passer inaperçu.
« Pendant 4 ans, j’ai construit cet être cohérent sans que rien vienne m’arrêter. »
Tout est savamment préparé. Les disparitions, les morts vont se suivre sans jamais se ressembler. Quiconque se met en travers de son chemin, aucune hésitation ne l’empêche de passer à l’acte. Elle ne laisse rien au hasard… ou peut-être pas… Un jour une faille ?
« Derrière le visage angélique et l’image de femme dévouée, pourrait se cacher l’une des pire tueuses en série que la France ait connues. »
Personne ne peut douter d’elle. Personne ne peut imaginer l’impensable. Des accidents. Les uns après les autres. Une maîtresse si gentille et si dévouée, que les enfants et parents adulent sans concession.
« Vous devrez vivre avec mon ombre assassine pouvant vous frôler à chaque instant au détour d’un regard, d’un geste anodin ou d’une parole amicale. »
Elle s’est fixée comme une mission. Destructrice. Mais qui pour elle, a un sens réparateur.
« Je dois contribuer à soulager le monde de ces femmes trop faibles, trop dégénérées pour vivre. Pour les empêcher d’enfanter et de perpétuer leur tares tout comme ma mère avait engendré mon frère et ma sœur. Mon passé allait revivre sans fin dans un cycle purificateur. »
« La vie n’est qu’effort et exigence envers soi-même. Dans le crime plus encore qu’ailleurs. »
Estelle Tharreau, vous m’avez piégée. Mi ange mi démon, Nadège Solignac est diabolique. Mais aussi incroyable que cela puisse paraître, au fur et à mesure, au fil des pages en découvrant son histoire, je suis presque arrivée au point de trouver une explication à son comportement, la comprendre… Et c’est là que vous avez divinement bien orchestré votre oeuvre, Estelle Tharreau. Sidérant. Un gros coup de coeur glaçant !
https://littelecture.wordpress.com/2019/04/23/mon-ombre-assassine-de-estelle-tharreau/