Alex Delaware, psychologue de son état, est appelé par une ancienne collègue d’un hôpital pédiatrique de Los Angeles : elle a besoin d’une expertise sur un dossier particulièrement difficile. La petite Cassie est admise régulièrement à l’hôpital avec des symptômes bizarres, contradictoires et incompréhensibles. Elle a déjà enduré tellement d’examens qu’elle a développé une phobie des médecins. Le corps médical commence à soupçonner un « syndrome de Münchhausen relayé » : la mère de Cassie la rendrait malade pour attirer sur elle l’attention et la sympathie des médecins et des infirmières. Outre la difficulté d’établir ce délicat diagnostic, l’équipe marche sur des œufs : Cassie est l’unique petite fille du directeur de l’Hôpital, un affairiste sans état d’âme qui fait régner la peur et l’austérité dans les couloirs.
J ‘avais lu un roman de Jonathan Kellermann il y a quelques années qui ne m’avait pas laissé un grand souvenir. Dans le cas présent, d’après ce que j’ai compris au fil des chapitres, il s’agit d’une aventure d’un héros récurrent, Alex Delaware. Honnêtement, j’ai lu ce roman indépendamment des autres et cela ne pose aucun problème de compréhension. Ce qui m’a attiré vers « La Valse du Diable », c’est qu’il s’agit d’une enquête médicale plus qu’une enquête policière, autour d’une maladie mentale mal connue et peu répandue : Le Münchhausen par procuration (ou Münchhausen relayé dans le monde anglo-saxon). Ici, sur fond de crise hospitalière, le psychologue et la médecin soupçonnent la mère et cherche des indices dans son attitude, ses paroles, sa façon de se comporter à l’hôpital, chez elle, ils fouillent un peu son passé. Plus on avance, plus on se dit qu’il y a bien quelque chose d’anormal. Le couple a perdu un premier enfant de la mort subite du nourrisson et le dossier médical du bébé disparu est introuvable. L’enquête psychiatrique s’entremêle avec l’enquête policière sur la mort étrange d’un docteur. Bien écrit, passionnant même par moment, très instructif à la fois sur le syndrome lui-même amis aussi sur l’état du système hospitalier américain, le roman nous apporte beaucoup sur un autre sujet. Le roman, écris en 1993, met en scène un homme d’affaires manipulant les fonds de pension de ses employés et perdant tout en bourse. Ça ne vous rappelle rien ? Jonathan Kellerman nous décrit par le menu l’affaire Enron avec 10 ans d’avance ! Comme quoi on aurait tort de prendre les romans noirs à la légère, parfois ils peuvent être visionnaires ! Pour revenir au cœur de l’intrigue, elle est suffisamment bien menée pour qu’on ne perde pas le fil, même si sur la fin on a l’impression que ce qui arrive à la pauvre Cassie est relégué au second plan, le dénouement (sous la forme d’un long et édifiant compte rendu d’interrogatoire policier) se paye même le luxe de nous surprendre. « La Valse du Diable » (surnom donné à l’accumulation d’examens médicaux subit par les victimes d’un Münchhausen) mérite le détour, écrit il y a 30 ans, il est sur bien des aspects d’une troublante modernité.