Astrid Houssin signe ce récit sur la douleur et la reconstruction
Une vie de peur, de froid et de faim. C’est tout ce qu’il a à proposer à son fils. Ensemble, ils avancent, emmitouflés et cramponnés à leur caddie. “On ne pourra pas survivre un autre hiver par ici… Il faut continuer vers le sud.”
On ne sait pas vraiment ce qui est arrivé au monde. Il n’est plus que ruines carbonisées sous un ciel de cendres et un trait de crayon tourmenté. Avec de pâles couleurs qui ne parviennent pas à réchauffer la saleté du gris. Avec quelques moments de joie, une baignade dans une cascade, une pente à dévaler, une vieille canette de soda, qui compensent, mais si peu, le chaos de leurs jours miséreux.
Sur la route, ils croisent parfois d’autres errants. Des hommes, prédateurs ou victimes, qui n’ont plus rien d’humain. Le petit a besoin de savoir. Qui sont les méchants, s’ils sont les gentils. Alors le père répète les mêmes mots, les mêmes conseils, les mêmes rituels.
“— Tu ne me crois pas ?
— Si. Je te crois toujours, papa… Il le faut bien.”
Il y a bien peu d’espoir dans cette odyssée dystopique. La dernière page, certes aussi sombre que la première, ne marque pas la fin du chemin. Vivre, c’est continuer. Il le faut bien.
Le chef d’œuvre de Manu larcenet
Grosse claque ! J'avais lu le roman il y a quelques années et il fait clairement partie des titres inoubliables de ma vie de lectrice. J'appréhendais donc un peu la lecture de cette adaptation, car je craignais de ne pas pouvoir retrouver toute la force du roman et des images qu'il m'avait mis en tête. Mais difficile de trouver les mots pour dire à quel point c'est réussi ! J'ai ressenti les mêmes sensations que lors de me découverte de l'histoire. On suffoque, on étouffe, on désespère. Aucune lumière à l'horizon, mais comme ce père et son fils, on ne peut pas renoncer, il faut continuer à avancer, même si on connaît déjà le dénouement. J'ai eu un véritable coup de foudre pour cette lecture.
Lorsque j’avais lu le roman La Route de Mc Carthy, lors de sa parution française en 2008, j’avais eu le sentiment d’une filiation avec d’autres romans qui m’avaient marqué (en l’occurrence : Ravage de René Barjavel, Malevil de Robert Merle et Je suis une légende de Richard Matheson). Mais il apportait une dimension supplémentaire dans cette relation essentielle entre le père et le fils revenus à des basics pour leur survie, tout en gardant leur humanité. Ces quelques traits s’exprimaient dans une histoire minimaliste à l’atmosphère pesante.
L’adaptation graphique de Manu Larcenet est exceptionnelle pour être parvenue à :
- restituer l’atmosphère sombre et étouffante (… comme de la neige) de ce monde apocalyptique, détruit, envahît par des cendres ;
- préserver la tension narrative de cette vie au jour le jour … sur le fil tenu d’une route devant mener à la mer (un but pour aller au lendemain) ;
- exprimer cette relation père fils (sans pathos et toute en retenue dans l’acceptation de la mort présente et à venir) et l’initiation à la survie de l’enfant, tout en préservant un minimum d’humanité et en le laissant se construire et affirmer ses actes et décisions après avoir obtenu certaines réponses à ses questions : le « Alors d’accord » qui ponctue l’acceptation revient comme un leitmotiv qui m’a profondément marqué.
La Route de Larcenet va bien marquer l’histoire de la BD. Il était attendu et il frappe fort. Il frappe même doublement fort avec :
- une publication en noir et blanc qui donne des images de ce monde brouillé, particulièrement fortes dans une alternance de dessins minimalistes, de traits marqués et nets, d’autres bouillonnants, d’aplats, …
- une autre publication avec des « gris colorés » qui insufflent un regard un peu différent, peut-être plus réaliste (?), en tous cas donnant une présence plus marquée à certains lieux ou situations, …
Pour une fois je ne choisirais pas entre le N&B et la couleur et je ne peux que conseiller de « casser la tirelire » pour ce double regard.
PS : A lire en papier bien sur
Il n'y a pas encore de discussion sur cet auteur
Soyez le premier à en lancer une !
Astrid Houssin signe ce récit sur la douleur et la reconstruction
La romance cartonne auprès des jeunes lecteurs, voici une liste qui les ravira !
Des ouvrages pour les adultes et les plus jeunes, qui aident à découvrir et comprendre la culture sourde
Notre héros, sous le nom de code "César", documente les tortures au péril de sa vie...